TW : mention de maltraitance, misogynieDrôle ? Réellement ? Cette blague était tout au mieux puérile, au pire carrément une insulte à l’intelligence de quiconque a eu le malheur de l’entendre. Je conserve un air suffisant et mes pensées pour moi-même, maintenant que nous devons nous pencher sur la raison de notre visite ici. Les bras croisés dans une attitude défensive, bloquant toute conversation en amont, je me contente de soupirer à ses énièmes élucubrations.
Ma mauvaise foi parle lorsque je songe à cette histoire de candidats. Dans ma tête, elle n’a pu passer ici que par le biais de pots de vins, de battements de cils face à un système qui est obligé de se plier aux exigences du moment et donc à la parité. Ca ne serait pas la première à avoir des passe-droits de ce genre ; certainement pas la dernière non plus. Ce qui est drôle dans cette histoire, c’est que…j’ai moi-même eu droit à un petit coup de pouce pour être engagé. Pas que je ne possède pas les qualités nécessaires, non…plutôt qu’avec mon comportement erratique sur le terrain, certains n’étaient pas très positifs quant à l’idée de me donner des responsabilités, tandis que d’autres voyaient plutôt ça comme un avantage. Un petit génie de la sorcellerie entraîné depuis l’enfance à faire des cabrioles, ça intéresse.
Moi qui pensais qu’elle me laisserait enfin tranquille, je profite d’un instant d’accalmie pour laisser mes sens vagabonder dans les environs à la recherche de la moindre menace pour ceux que nous protégeons à deux. Rien ne semble planer pour l’instant ; je devrais me détendre, pourtant je reste droit comme un piquet.
“Ce n’est pas parce que la menace est invisible pour le moment qu’elle ne frappera pas sans crier gare. C’est la raison de notre présence ici. Sinon, ils n’auraient pas besoin de protection…encore moins la protection de l’élite.”Car c’est bien ce qu’est ce rôle de Bourrasqueur : l’élite des gardes du corps, ceux qui ne laissent rien passer et avec qui les erreurs n’arrivent jamais. Nous avons tant de responsabilités sur le dos que prendre le rôle à la légère est hors de question. C’est ce que j’essaye de lui inculquer, à cette petite pimbêche…mais malheureusement, il semblerait que sa cervelle vide n’emmagasine rien de cette leçon. Pourquoi me poser tant de questions d’un coup ? Je la jauge du regard, l’air méprisant comme à mon habitude, avant de soupirer longuement.
“Non. Plus ou moins. Absolument pas. Non.”Je coupe court à la conversation par des réponses en monosyllabe, et je le sais bien. Un nouveau regard en sa direction m’apprend qu’elle ne lâchera pas l’affaire ; elle semble prête à tout pour entrer dans mes bonnes grâces, et ce comportement me fait ressentir de la pitié pour elle.
Tu pourrais être un peu plus sympa quand même, elle est gentille !
C’est pas mon problème. C’est une femme, et elle est idiote.
Tu sais pas si elle est idiote, tu refuses de lui parler…Une grimace déforme mon visage pendant une fraction de seconde, avant que je retrouve une expression plus neutre. Thanikos a raison bien sûr, et je suis certain que Jager me sortirait la même chose. Je devrais lui tendre la main, à cette petite qui ne souhaite qu’une chose : d’avoir une sorte de mentor dans sa profession…et il est vrai que depuis ses premiers pas par ici, je ne lui ai laissé aucune chance. Je l’ai toujours évitée. Un nouveau soupir passe mes lèvres, et sans la regarder, j’accepte de poursuivre la conversation.
“Je n’ai pas besoin de travailler, ma famille est suffisamment riche pour entretenir de nombreuses générations futures. Mais je suis tout de même ici pour diverses raisons qui me sont propres. Quant à la maîtrise de la magie…”L’esprit vagabond, je lève la main devant moi et fais apparaître quelques petits éclairs qui courent le long de mes doigts, les liant entre eux pendant un court instant avant de disparaître.
“J’ai travaillé dur pour être toujours en avance sur la norme. J’ai atteint mon palier 2 dans son entier vers 10 ans, et je commence déjà à maîtriser certains aspect du 3 à 35 ans. Ca peut paraître extraordinaire pour le commun des mortels, mais c’est le moins qu’on puisse attendre d’un Karlsson.”Pour être honnête, ma famille a même été déçue d’apprendre que je ne savais encore pas tout faire à huit ans. Les larmes, les cris et les longues heures de travail ont été mon quotidien pendant des années, continuent de l’être planqué derrière les murs du manoir. Je doute qu’une gamine de son genre comprenne quels sacrifices sont nécessaires dans ce genre de situation.
“La rigueur est le plus important. Comme pour ce métier. Il n’y a aucune place pour le repos, pour les loisirs non plus. Si je maîtrise cette magie, c’est parce que j’ai abandonné une grande partie de ma vie pour m’y consacrer. Je l’ai étudiée, façonnée, l’ai laissé me blesser pour habituer mon corps à la supporter.”Le comportement de ma famille a eu du bon, quand on y pense. Les cicatrices qui parcourent mon corps sous cette couche de vêtement que je refuse de quitter ont leur avantage, et je me rassure en songeant qu’il s’agit plus d’une aide que d’une punition lorsque les éclairs s’allument derrière la façade du manoir.
“Je doute que tu en sois capable. Tu restes une femme avant tout, et honnêtement…tu sembles avoir été élevé dans un cocon. Protégée de tout. Tu ne supporterais pas un tel entraînement.”Crédits ; Dust