to be a family - Lucius & Nero

TW : nop
"Je crois que c'est Maurice LeFrançais*.", annonça fièrement Jade, le nez légèrement pointé vers le ciel, un sourire presque narquois sur les lèvres.

"Alors pas du tout." commenta Hugh, confortablement installé sur le fils de sa sorcière, le museau collé à la carte de Trivial Pursuit : Wizard edition dans son petit costume de soirée jeux. "LeFrançais, c'est sa nationalité, son nom de famille c'est Lebon." poursuivit le teckel, la tête dépassant à peine de la table, faisant disparaître toute expression triomphante du visage de sa maitresse, qui laissa tout de même échapper un rire peiné. La victoire venait de lui échapper sur une question d'histoire, et c'était désormais au tour de Nero, qui, s'il jouait bien, pouvait remporter deux camemberts en une seule fois et la coiffer au poteau. Sans compter l'avancée de Lucius, qui jouerait ensuite, et qui avait également une chance raisonnable de l'emporter. Elle avait probablement raté sa chance de gagner la partie, et il fallait qu'elle l'accepte, malgré son sens aigu de la compétition.

"En plus, son prénom c'était Philippe.
-... Donc c'est deux personnes différentes?
- Probablement. On est nuls en français. C'est à Nero de jouer!"

Une fois de plus, sa méconnaissance des covens européens lui coûtait la victoire. Mais était-ce de sa faute, à elle, si elle n'avait jamais appris qui était le botanomancien qui avait concocté des potions hallucinogènes à base de glands, de fruits rouges, de liqueur de sapin, et d'inquiétantes doses de sang-de-coeur devenant par la suite et dans sa version édulcorée une obscure liqueur a 65° dont raffolait l'excellence Serpentine il y a deux siècles? Non, évidemment. On lui aurait posé la question sur quoi que ce soit d'américain, elle s'en serait très bien sortie, et c'était la chance qui était contre elle.

Attendant que Nero lance les dés, et se saisissant de la petite carte sous les jappements de Hugh qui voulait absolument lire la question a défaut de pouvoir jouer (un incident impliquant Gros Bill de la boîte de Taboo et un Hugh déchainé qui voulait absolument comprendre ce qui faisait "pouet" dedans, dix ans auparavant, avait définitivement réglé pour le familier la question de sa participation aux jeux de société), Jade prit le temps de considérer l'agréable moment qu'ils partageaient. Certes, Mark était (encore) de garde, mais il avait promis de rentrer le plus tôt possible, et, même si elle ne savait que cela ne voulait concrètement rien dire, son époux ne maîtrisant que corollairement les blessés et malades des différents covens, elle était tout de même réjouie qu'il souhaite se joindre à elleux. De la même bonne volonté, les garçons veillaient avec elle jusque tard, et elle avait mis des mini apple pies à décongeler dans le four aux douces senteur d'automne tandis que la table de jeu croulait sous les sodas, le pop corn et autres douceurs exceptionnelles : c'était soir de veillée, et tous les excès étaient permis.

D'autant qu'elle n'avait pas eu tant d'occasions que ça de fréquenter le nouveau compagnon de son fils. Si un bon jeu de société était l'occasion rêvée de le rencontrer un peu mieux (et de voir comment il interagissait avec Lucius), elle était également contente de simplement passer du temps avec : si leur relation était appelée à durer, il était important que Nero se sente chez les Jager comme chez lui, et cela passait par ce genre de moments familiaux, qui seraient appelés à se reproduire si tout se passait bien. Jade ne savait pas encore si elle aimait beaucoup Nero - c'était encore trop tôt, et il semblait assez évident que personne n'était à l'aise - mais elle était déterminée à être la meilleure belle-mère possible. Un jour, il cesserait bien de la vouvoyer et de l'appeler madame, et elle était a peu près convaincue de la capacité de son fils à faire des bons choix amoureux.

"Nero, autre chose à boire? Lucius?
- Jade, je dois poser la question!"

La pyromancienne leva les yeux au ciel, et jeta un regard qu'elle espéra complice aux garçons, avant de murmurer "c'est qu'on va se faire engueuler, en plus", avant de tendre la petite carte sous le nez de Hugh, réjoui.

"Nero, c'est une bonne question pour toi! (le teckel se souciait assez peu du vouvoiement) Qui était l'aéromancien écossais qui a signé le traité de paix en 1942?"

*prononcé Leufronçééééééy*

Crédits kawaiinekoj;

TW : alcool, mention d'enfance abusive

La situation me paraît surréaliste. Non...elle l'est concrètement, et c'est peut-être pour ça que je n'arrive pas à comprendre la moitié de ce qu'il se passe autour de moi. Je savais déjà que la vie de famille des Jager était très différente de la mienne, et je savais d'autant plus que ce que j'ai vécu chez les Karlsson n'est pas considéré comme "normal" pour la plupart des gens. Mais entre le savoir et l'expérimenter, il y a un écart énorme auquel je ne m'attendais pas. Depuis que j'ai posé un pied dans cette petite maison, j'ai l'impression d'être entré dans l'un des rêves étranges de Lucius. Tout me paraît...irréel. Faux, presque. Est-ce que c'est moi qui laisse encore une fois ma paranoïa prendre le dessus, ou y a-t-il réellement anguille sous roche ? J'attends les reproches depuis un moment maintenant. Des reproches qui ne tarderont pas à venir, lorsque la matriarche de la famille se rendra compte de qui je suis...ce que je suis.

Et pourtant, rien ne vient. La gentillesse suspecte qu'elle fait preuve à mon égard n'a aucun défaut, sa colère passionnée semble dirigée davantage envers un jeu dont j'ai du mal à saisir les règles plutôt qu'envers son fils et moi. Son fils d'ailleurs, qu'elle a gratifié d'une embrassade et de quelques mots doux dès le départ, comme s'il s'agissait de son amant. Glauque. Est-ce ainsi que les parents se comportent dans une famille normale ? Je n'ai fort heureusement pas eu le droit à ce même traitement, peut-être à cause d'un mouvement de recul de ma part. De quelques éclaircissements de mon amant également, expliquant que je ne suis pas très "tactile" comme type. De quoi donner une première impression assez gênante.

Mais rien ne vient, une fois de plus. Aucun reproche. Aucun hurlement. Aucun geste déplacé, aucune humiliation verbale, physique ou que sais-je. Simplement un sentiment de bien-être que je n'ai connu qu'avec la présence de Lucius à mes côtés, et le fait qu'une troisième personne soit présente - ainsi que son familier à l'apparence ma foi étrange - ne change rien à la donne. J'ai du mal à comprendre. J'ai besoin de faire des pauses, je reste globalement silencieux autour de la table. Seul l'alcool m'aide à me détendre suffisamment pour ne pas être simplement un bloc de glace - ou tout du moins, faire légèrement fondre ledit bloc. Parce que c'est une soirée "détente", n'est-ce pas ? C'est comme ça qu'il me l'a désignée, en tout cas. Pourtant, j'attends encore le moment où tout basculera.

Le jeu en question est une série de questions de culture générale portée sur l'histoire sorcière. Certaines sont plus simples que d'autres, et je me prends à réellement m'amuser de me souvenir des cours à l'Académie. Cette période était encore si insouciante...plus ou moins. J'avais quelques lacunes dans certaines matières, lacunes que j'ai comblé en me plongeant corps et âmes dans d'innombrables bouquins jusqu'à n'en plus pouvoir. C'est le devoir d'un Karlsson de montrer l'exemple après tout, et d'être premier en tout. Pour ce qui concerne la culture non académique...ah, pour le coup, je ne suis pas aussi doué. Et c'est relativement frustrant.

"Non merci, madame..."

Elle ne semble pas apprécier ma politesse, madame Jager. Mais je n'arrive pas à...me conformer à leurs moeurs. C'est une cassure un peu trop importante pour un type de ma condition. Peut-être qu'un jour, je l'appellerai "Jade"...mais le vouvoiement ? Ah. Ca n'est pas prêt de disparaître.

Ce jeu-là fait ressortir mon côté compétitif. Comme si j'avais besoin de prouver ma valeur en sortant toutes les informations possibles et imaginables en guise de réponse. Mais lorsque la question du familier-saucisse - décidément, je ne me ferai jamais à son apparence - fuse, mon visage perd une nouvelle teinte de couleur. Pas que je ne connais pas la réponse, non...mais parce que je la connais trop bien. Je soupire longuement, et d'une voix monocorde, répond immédiatement.

"Charles. Augustus. McGuire. Excellence Serpentine aéromancien de 1932 à 1946, qui a enchaîné deux mandats avant de décéder en 1947 de la tuberculose. C'est lui qui a appuyé le refus de coalition des covens européens, avant de plier face à la demande française, non sans négociation. Ce traité de paix fut utilisé pour appuyer la candidature de son rival, Frank Smith, pyromancien aux origines allemandes lointaines, qui prendra sa succession."

Le silence ainsi que les yeux ronds posés sur moi me font me demander si je n'en ai pas trop dit. On me l'a déjà reproché de nombreuses fois. "Info dump", que certains ont osé me dire lorsque je leur explique en long, en large et en travers un sujet qui m'intéresse particulièrement. Pour cette histoire, c'est assez spécial ; disons que je ne pouvais pas ne pas le savoir. Je termine mon verre pour me donner du courage, et lève le regard vers Lucius.

"C'est mon arrière-grand-père. McGuire, c'est ma famille maternelle. Cette histoire, j'y ai eu droit pendant des années quand j'étais petit. Comme celle des autres politiciens de la famille. Ichabod aussi pourrait te réciter le curriculum de chacun de nos ancêtres jusqu'aux années 1750 au moins..."

A moins qu'il ait décidé de l'oublier, n'ayant pas la mémoire d'un nécromancien. Ce n'est pas non plus une fierté nationale d'avoir autant de politiciens conservateurs dans ses rangs, hmm.

Je me rends compte que balancer ça semble avoir jeté un froid dans la pièce. Les oreilles rouges de honte même si je conserve un visage impassible, je baisse les yeux vers la nourriture sur la table, et ose sélectionner une boule blanche - un "popcorn" je crois - entre le pouce et l'index. C'est un étrange repas que nous faisons là ; pas de dîner chez les Jager, seulement des "snacks" comme Lucius aime manger de temps en temps. A moins que le dîner arrive bien plus tard ? L'heure normale est déjà passée, mais ils sont américains après tout.

"Oubliez. J'ai peut-être un peu trop...enfin, oubliez. C'est la bonne réponse, non ?"

Le malaise est palpable, à moins que ça ne vienne que de moi. J'ai répondu correctement, et bien avancé le pion...je crois. Je crois que j'ai même gagné ? Non, c'est encore trop tôt pour le dire. Mon côté compétitif l'emporte, une fois de plus, et j'apprécie grandement de voir mon pion dépasser celui de Madame.
Crédits kawaiinekoj;

Une vie de famille paisible et tout à fait ordinaire, c'est quelque chose que Nero n'a jamais eu le loisir de connaître. Il a fallu que Lucius le prépare en amont, quand en Août les présentations ont dû être faites. C'était nécessaire, ça devenait inévitable et il aurait bien fallu y passer un jour ou l'autre. Maintenant qu'il n'y a plus personne à qui mentir sur leur amour, plus personne pour les juger sur ce point -à part les personnes profondément connes-, il a fallu introduire Nero à la famille Jager. Lucius lui a expliqué longuement que ses parents étaient gentils. Qu'ils étaient un peu comme lui, qu'il n'y avait pas besoin de faire de chichis et simplement d'être naturel, détendu, le plus possible. Ce qui est difficile, pour l'Aéromancien. Mais petit à petit, ils vont y arriver. Il a fallu plus d'un an pour que son petit ami cesse de l'appeler par son nom de famille, pour qu'il utilise enfin son prénom. Maintenant, ça lui manque de ne plus être appelé Jager, il en avait pris l'habitude à force. C'est cependant une évolution positive, le signe que son amant se fait enfin aux mœurs des gens de tous les jours. Alors Lucius sourit. Et explique la veille ce qu'est une soirée jeux de sociétés à son petit ami. Un simple moment, autour d'un jeu avec un plateau et des cartes. Chaque jeu a ses règles, qu'on lui expliqueras et c'est juste un moyen de s'amuser ensemble, pour passer du temps en famille. Rien de plus. Personne ne se fâcheras contre lui s'il perd, s'il n'y arrive pas et l'intérêt c'est d'apprendre à se connaître pour lui et sa mère, Mark étant d'astreinte au CHU ce soir-là.

Son altesse Party Nuggets a reçu un bain et un brushing en fin d'après midi, afin d'être présentable. S'il n'a pas de petit costume contrairement à Hugh sur les genoux de l'Oniromancien, le chat sent particulièrement bon et aborde un poil soyeux qu'il exhibe à toutes les personnes présentes; s'étalant de tout son long sur le canapé familial lors de sa sieste.

La bouche pleine de pop corn, le fils Jager hausse les épaules aux explications du teckel :

« Au moins t'as eu la nationalité du gars maman. »

Lui n'aurait sans doute pas fait mieux à cette question si spécifique. C'est que ça deviens dur, du moins, c'est l'impression qu'il en a au fur et à mesure que la partie de trivial poursuit avance. Les questions du début lui semblaient plus simple, il a pu marquer quelques points sur une question en sport, pour citer le plus grand médaillé de natation à l'internationale dans le monde magique. Un Hydromancien sans surprise et les sorcier.ères ont en commun avec les humains d'exceller dans ce sport aux Etats-Unis. C'est une chance qu'il ait hérité de l'amour du sport de sa mère, mais aussi qu'il ait fait de la natation pendant quelques années à l'Académie. Il aimait ça, Lucius. Plus que l'escalade pratiquée par sa mère, plus que la course aussi. Malheureusement, il n'a plus le droit de nager : au cas où il s'endorme, au cas où il ait une cataplexie soudaine en plein milieu du bassin. Il en est triste parfois, mais puisqu'il n'y peut rien... Ne s'appitoie pas sur son sort. C'était bien le temps que ça a duré, ça lui avait permis de prendre confiance en lui et de se faire des amis à l'époque de l'Académie, alors autant ne se souvenir que du positif pour ne pas avoir de regrets et pouvoir en sourire plutôt qu'en pleurer.

« Hum, on va bientôt finir la bouteille de Mountain dew, je te ressers d'ailleurs pour la vider.  »

Et c'est au tour de Nero de répondre à une question, pendant que sa mère part chercher des aple pie au four pour la suite de la soirée. L'odeur de canelle ravit Lucius, qui n'écoute qu'à moitié la questions avant de sortir de sa rêverie éveillée lorsque son petit ami répond. Et... Sort une véritable biographie du bonhomme concerné. Mais... C'est son arrière grand-père. C'est presque trop facile du coup, il aurait forcément connu la réponse. Pourtant personne ne proteste. Hugh le maître du jeu répond simplement que la réponse est bonne, sans arbitrer quoi que ce soit. Alors, Lucius glisse les petits camemberts dans les fentes, avant de tirer les dés à son tour.

« Je suppose que ça doit être normal si ta famille est importante. Tout ce que je sais c'est que je m'appelle comme mon arrière grand-père et qu'il était dentiste. »

Qu'ils sont originaires, de façon assez lointaine, des terres Allemandes. Ou de quelque part par-là, en Europe, quand son arrière arrière grand père a déménagé aux états unis un peu avant la grande guerre. En quelle année ? Il est infoutu de le savoir par contre. Chez les Jager, personne n'a jamais été très important à première vue. Peut-être de ce côté de l'Atlantique, dans les montagnes habitées par les pyromancien.nes du Tyrol ou des Alpes. Mais pas aux USA, où le seul membre imminent de sa famille est semblerait il sa grand mère ayant officié comme Oracle des flammes.

Avançant son pion avec patience, tombant sur une case aux couleurs de la culture pop, Lucius se réjouit en pensant qu'il pourra répondre. Tant que ce n'est pas pour lui poser une question sur une série obscure des années soixante que regardaient ses grands parents quand ils étaient encore jeunes. Sans lire la carte, il la tend donc devant le museau tu teckel en regardant vaguement le coin de la porte, où sont gravés ses poussées de croissance. Hugh y est aussi représentés, voulant participer bien qu'il ait déjà terminé de grandir, tout comme Nuggets que l'on voit passer d'un chaton à un chat adulte à peine plus bas que le Teckel.  

Qui a chanté “La Lune des Enchanteresses” en 2005 ?

Lucius n'a pas le temps d'hésiter. Il sait, il s'en souvient et était amoureux de la chanteuse pop quand il avait une dizaine d'années :

« C'est Tamsin Storm. »

Crédits kawaiinekoj;