Caractère
Penny est une femme
extravagante. C'est le mot qui saute aux yeux et qui s'agite dans l'esprit de toute personne qui la rencontre. On peut aisément la voir avec ses couvre-chefs roses, violets, oranges parfois même. Une insupportable tendance à ajouter "
darling" à la fin de toutes ses phrases et une manière de parler très léchée.
Mais sous ses airs de bonne duchesse - qu'elle n'est pas bien qu'elle prétende avoir un titre de noblesse - se cache le masque social craquelé d'une enfance désolée. Ses parents ont totalement délaissé la petite Penny qui n'avait que sa
nanny et ses yeux pour pleurer. Sa solitude l'a conduit à ne faire confiance qu'à elle. Tendance qui s'est confirmée, lors de sa scolarité. Une connaissance ou deux, un petit-ami qui s'est glissé dans le décor, tout ça pour l'accompagner durant sa longue et pénible scolarité.
Désespérée de faire parti de la tribu des copains des arbres - ne pas y voir de critique mal placée, elle est hargneuse - Penelope était déterminée à émerger comme une sainte, seule, éclectique, et elle s'est forgée un personnage à la hauteur. Mais cette personnalité dans le fond n'est qu'un leurre et elle serait bien du genre, si elle n'était pas sorcière, à se faire tous les Bridget Jones avec son pot de Ben&Jerry's. Ses tailleurs aussi extravagants que ses chapeaux conduisent certaines mauvaises langues à dire que c'est pour ressembler à Elizabeth - II - mais elle refuse de l'admettre. D'ailleurs c'est un de ses grands défauts :
butée et
têtue, Penny a du mal à dire qu'effectivement, elle abuse "un peu". Heureusement que l'
humour la sauve parce que sa
fierté pourrait l'étouffer. Enfin bref ! Pour sortir du lot parce que c'est ainsi que va la vie, Penelope a totalement rejeté ce qu'elle est au fond d'elle et qui ne vise qu'à surgir pour vivre enfin. Elle repousse ses instincts les plus profonds, son talent magique bouillonne au fond d'elle. La réalité, c'est qu'elle aurait bien voulu plutôt jouer à la petite sirène qu'à la druidesse. Ingérable, toujours à
en faire des caisses parce que sinon on s'ennuierait trop, chacun mérite à la fois la paix et d'avoir une Penelope dans sa vie.
Histoire
«
Magne toi Penny ! ». "
Tap tap tap". Des pas accélérés retentirent alors que les deux gamins de 17 ans essayaient d'outrepasser le couvre-feu. C'était presque excitant de faire le mur de la sorte, le couvre-feu était passé de quelques minutes désormais, et s'ils se faisaient prendre, un garçon et une fille à déambuler dans le château après l'heure fatidique, ils pourraient se faire souffler dans les poumons au point de ressembler à un fugu. On pourrait croire facilement que ce soit des amusements que des élèves de secondaire pourraient faire - les primaires étant encore trop mignons et petits pour penser à mal - mais la réalité c'est que Penny et son petit-ami avaient envie de faire des expériences d'échanges salivaires.
«
Non mais vous n'avez pas honte ? ». Argh... Le filet de bave mis tellement de temps à disparaître que les joues de la zoomancienne devinrent cramoisies comme une tomate bien mûre. Se retrouver devant un professeur de Magie qui semblait venir tout droit de l'âge de pierre, dans cette situation spécifiquement, lui donnait envie de s'enterrer vivante. «
Eeeeeuh nous pouvons tout vous expliquer ». En réalité, elle comme lui savaient qu'il n'y avait rien du tout à expliquer. C'était, comme on disait, être pris la main dans le sac.
C'est ainsi que Penelope fut collée, comme son petit-ami qui pouvait cependant frimer devant ses copains pour s'être fait prendre dans une situation pareille. Malheureusement, ils ne furent pas collés ensemble, ce que la jeune femme associa immédiatement avec un drame épouvantable. Elle en pleura presque réellement deux nuits d'affilées, de quoi fendre le cœur de pierre de n'importe qui - pas du prof qui les avait collé. Comprenez-là, c'était sa première relation
SÉRIEUSE (oui oui) et on lui arrachait l'opportunité de faire ses premières expériences. Déjà qu'il était suffisamment malheureux de devoir porter ces uniformes simples - par extension hideux alors bon... Elle n'était jamais sortie des clous, elle avait toujours des bonnes notes même si elle n'aimait pas sa spécialisation magique. Tout ce qu'elle demandait un peu, c'était de vivre. Jamais elle n'irait admettre qu'elle avait tort, la malheureuse, alors même qu'elle n'avait simplement pas respecté le couvre-feu.
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«
C'est vraiment très élégant tu sais ». Cela faisait la quatrième fois qu'elle disait la même phrase, en retroussant le nez comme elle le faisait toujours quand elle réfléchissait à quelque chose. La vérité, c'est qu'elle avait créé un magnifique couvre-chef pour l'anniversaire de sa grand-mère, quelque chose dont elle pensait
SINCÈREMENT que cela puisse lui plaire. Trois magnifiques plumes jaunes sur un chapeau melon en daim bordeaux, agrémenté d'un nœud noir. Mais un coup d’œil à la mine déconfite de son aïeule suffisait à lui faire comprendre que l'objet et le cadeau en question ne lui plaisait pas vraiment... C'était le moins que l'on puisse dire. «
C'est original ma chérie » finit-elle par dire. Sa large bouche avait mis du temps à s'ouvrir pour laisser sortir cette phrase qui ressemblait davantage à un croassement qu'autre chose. Les choses "
originales" ne plaisaient guère à sa famille et c'est bien pour cela d'ailleurs que faire de la couture était non seulement une évidence, mais également un objectif qui tenait à la mission de vie spirituelle. Penny plissa les yeux, jeta un regard vers sa mère qui était à côté et qui affichait un air de fouine qui semblait se délecter de la situation.
Penelope et sa famille, c'était une histoire somme toute compliquée. Ses parents n'avaient jamais pris soin d'elle, trop occupés qu'ils étaient à être des sorciers modèles, impliqués dans leur coven. Papa était un être complètement déluré et c'était assurément de ce côté de la famille qu'elle avait elle-même pris ses tendance, passionné par son métier d'apiculteur, toujours à parler avec ses abeilles. Ce n'était pas pour rien que c'était son familier d'ailleurs, ce qu'elle avait toujours trouvé un peu ironique parce que son père était bien la dernière personne capable de piquer qui que ce soit. Les crises de colères venaient plutôt de Maman qui travaillait dans les archives des Enfants des Vagues. Sa mère était une personne plus terre à terre que son père, plus froide que lui également et elle désirait farouchement qu'elle s'investisse dans son coven, au lieu d'errer et de faire des chapeaux qu'elle ne porterait même pas à un carnaval. C'était d'ailleurs une remarque qu'elle lui avait faite un jour et Penelope lui jeta un regard attentif en s'attendant à une mauvaise remarque. La volonté farouche de se démarquer, de se faire remarquer par ses parents qui n'étaient pas présents dans sa vie l'avait conduit à se porter vers une occupation originale, d'autant plus qu'elle avait la chance d'être une femme manuelle. «
Tu pourras au moins le porter aux mariages Grand-Maman » affirma-t-elle. Elle avait pensé un temps dire qu'elle pourrait le porter aux enterrements mais elle n'était pas certaine que sa grand-mère soit réceptive à son humour très britannique.
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«
Franchement, je ne vois pas pourquoi ils agissent comme ça », la réflexion avait filé des lèvres écarlates de la sorcière qui, allongée sur le toit d'un immeuble écossais, parlait à son familier. Volusa était comme elle, et elle était comme son familier, émanation magique qui la comprend finalement mieux que n'importe qui. Toutes les fois où Penny avait failli s'effondrer, c'est grâce à son familier qu'elle avait tenu. Comme un pilier inébranlable de sa personnalité, Penelope lui confiait toujours ses craintes, ses interrogations et les injustices dont elle avait besoin de se départir. Volusa, elle, lui répondait, la rassurait, comme si son inconscience trouvait les mots afin de la soulager. «
Nos parents sont difficiles » commença-t-elle sagement. Elle avait toujours employé le "nous" et cela avait un sens très rassurant pour la sorcière qui était enfant unique, «
ils sont isolationnistes parce qu'ils ont peur. L'histoire leur a donné raison en partie ». La figure pensive de Penny ne se transforma pas en grimace et demeura un masque froid, alors que sa main se levait pour caresser l'arrière de l'oreille de son familier. «
Le côté de Maman est le plus strict mais elle est toujours stricte pour tout » finit par répondre Penelope. Cette dernière s'était toujours sentie enfermée dans une famille qui n'était pas pour elle, électron libre au style décadent. Qu'elle ne veuille pas s'impliquer dans le coven était une pilule difficile à avaler pour sa famille, même pour sa mère qui ne faisait pourtant pas parti du même coven qu'elle, mais qu'elle ait des idées expansionnistes, c'était la goutte qui faisait déborder la fiole. Son père était isolationniste par anxiété profonde, c'était encore différent. Volusa se lécha la patte pendant quelques secondes avant de la passer derrière ses propres oreilles et Penny arrêta de la caresser à cet endroit. «
Tu as vu la scène qu'ils m'ont faite ? » - les larmes montèrent aux yeux de la sorcière qui, bien qu'elle savait qu'elle pouvait pleurer devant son familier, avait toujours une pudeur inhérente à sa personnalité qui l'empêchait de le faire. Elle ne supportait pas de se faire humilier pour ses idées et pourtant, le regard bleu perçant de sa mère avait semblé la crucifier sur place. «
Des fois, j'ai envie de partir simplement et de ne plus rien devoir à personne ». La pensée l'avait traversé à chaque grande crise qu'elle avait enduré avec sa famille. «
Ou de ne pas être une sorcière ? » ; «
Ça non » répliqua-t-elle en souriant pour la première fois depuis qu'elle s'était allongée sur ce toit, «
sinon on ne serait pas ensemble ».
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La tête dans les fesses de bon matin, Penny avait devant elle un porridge complètement raté, un peu cramé sur le dessous parce qu'elle avait laissé la casserole chauffer trop longtemps et avait mis le feu trop fort. Résultat des courses, elle était de mauvaise humeur, en plus d'avoir un goût de brûlé dans la bouche que même le sirop d'érable ne faisait pas disparaître. A côté d'elle, Volusa se lustrait les poils sans faire de commentaire. Il n'était pas très tôt, il était même assez tard en fait, mais alors qu'elle mettait sa cuillère de porridge dans son gosier, elle vit débouler l'aéromancien qui squattait sa coloc' depuis des lustres. Le lynx leva le nez de sa patte pour fixer sobrement le jeune homme. Comme sa sorcière, elle n'était pas l'animal le plus sociable au monde. Penelope aimait bien sa tranquillité, bien qu'elle tolérait la clientèle susceptible de lui acheter ses créations. Le fait est que malgré le poste de ses parents dans le coven, elle ne leur avait jamais demandé d'argent et que son indépendance la poussait férocement à ne jamais en demander. Elle avait donc très tôt désiré se faire son plateau d'or seule, mais malheureusement, elle était une créatrice pour l'heure sans grand succès. Mais depuis que
Duh squattait sa coloc, Penny avait dans l'idée de l'utiliser pour lui fabriquer des vêtements afin qu'il soit son meilleur ambassadeur. La vérité, c'est qu'elle appréciait beaucoup plus ce garçon que ne le laissaient imaginer ses yeux bleus. Silencieuse, elle prit son temps de mastiquer son porridge brûlé avant de lui dire : «
Tu es davantage un membre de la coloc' qu'un squatteur maintenant, tu ne crois pas darling ? » demanda-t-elle poliment avant de replanter sa cuillère dans le porridge pour le porter à sa bouche. Elle ne voulait pas le mettre mal-à-l'aise, simplement lui proposer de rester. Coloc' de quatre, devenu coloc' de trois puis recoloc de quatre. A dire vrai, Penny s'était mise en colocation parce que l'argent, ça pouvait être un peu compliqué à gérer, surtout avec un travail qui payait au lance-pierre. Elle commençait à se demander si elle ne ferait pas mieux d'aller travailler pour le coven... Mais elle avait sa fierté et si elle disait qu'elle allait percer, elle percerait. «
Si tu veux rester, j'en touche deux mots aux autres et ils n'auront pas leur mot à dire » - elle manqua de s'étouffer avec un flocon d'avoine et Volusa poussa un soupir à peine audible.