Razor sharp flowers ft. Haesik

La vie se doit de suivre son cours. C'est ce que se répète Lucius depuis l'annonce fatidique. Nero lui maintiens que ça devait arriver un jour ou l'autre. Que sa famille ne lui aurait finalement jamais laissé le choix ou même la liberté et ce, malgré tous ses efforts pour leur convenir. Pour être le fils parfait. Mais il doit être bien plus que ça : il se doit d'être un héritier. Pensées désuètes que l'Oniromancien ne comprend guerre. Ou du moins, qu'il n'imaginais plus en pratique au vingt et unième siècle dans un pays développé comme le leur. Parce qu'une famille, c'est avant tout un nom pour ces gens. Un nom qu'il faut transmettre à tout prix, pour assurer la pérennité, pour assurer que les finances et le patrimoine soient stables. Et on ne peut pas faire ça avec n'importe qui : il faut obligatoirement que le fils de la famille, celui avec le statut d'héritier, épouse une femme convenable du même milieu. Qu'importe les sentiments, l'amour, les préférences. Jamais les Karlsson ne voudraient d'un homme qui aime le même genre que le sien, à la tête de la famille. Certes, Nero et lui peuvent essayer autant qu'ils le veulent : il n'y aura pas de descendance dans cette union, tout ce qu'il y aura à en tirer c'est un bon moment. Il n'y a plus d'autre fils. Il n'y a plus que lui. Il est d'ailleurs l'aîné, et vraisemblablement les parents Karlsson ont toujours prévu que ce serait lui l'héritier. Qu'importe qu'il y en ait eu deux autres derrière. Aurelius est malheureusement décédé lors de sa jeunesse. Ichabod a été assez malin pour fuir. Nero aurait dû lui aussi. Rester aux états unis. ça voudrait dire que jamais, ils ne se seraient connus tous les deux. Mais si l'on ne sait pas, ça ne peut pas vous manquer... Alors, ça aurait été pour le mieux. Qu'il ne revienne jamais.

Aucune magie n'est capable d'altérer le cours du temps. Il est impossible de changer les décisions que l'on a pu prendre et on ne peut malheureusement, que les regretter lorsqu'elles n'ont pas été des plus éclairées. Une vie c'est une suite de décisions. C'est ce que se répète aussi Lucius. L'Oniromancien tente de se convaincre qu'on a toujours le choix, même s'il est parfois difficile et complexe. Il sait pour sur, que Nero ne souhaite pas épouser Moira. Il doute fortement qu'elle non plus ne veut pas de ce mariage. Lors de la fête de Yule, si l'hydromancienne n'a pas semblé le reconnaître, lui sait qu'il s'agissait bel et bien d'elle.
Jager a beaucoup changé, depuis ses années à l'Académie. S'il est bien entendu toujours aussi grand, ses cheveux sont plus beaucoup plus courts et son corps bien plus musclé qu'à l'époque. Autrefois, il était un adolescent extrêmement mince aux cheveux très longs.

Et puisqu'elle était accompagnée d'un homme... Un type qu'elle a choisi en son âme et conscience. Pas quelqu'un qu'on aurait pu lui imposer. Un jeune homme qui doit avoir à peu près le même âge qu'eux. Asiatique, accompagné d'un familier assez imposant. Gros loup au pelage blanc, qui a réussi à impressionner un peu Lucius qui lui en possède un bien moins imposant : un gros chat himalayen à la longue fourrure soyeuse et à la fainéantise inégalée. Il avait l'air d'être une bonne personne. C'est l'impression que Jager en a eu du moins. Généralement, ses intuitions sont les bonnes. Il est rare qu'il se trompe sur le compte de quelqu'un et aime donc se fier à son instinct... Et son instinct lui dit que peu importe qui il est, ce mystérieux petit ami, on pourrait lui faire confiance. Il a d'ailleurs évoqué la possibilité à Nero, qui a bien entendu... immédiatement refusé. Pourtant, Lucius reste convaincu qu'il faudrait unir leurs forces, à tous les quatre.

Comment le retrouver ? C'est une autre question. Il n'a pas vraiment de nom ni de prénom. Juste un physique, ainsi qu'un familier. Et du côté du zoomancien -qu'il suppose sans en être certain-, les informations sont aussi maigres. L'Oniromancien n'est qu'un grand gars aux yeux en amandes. Avec ses vêtements le recouvrant et un masque sur le bas du visage, aucun tatouage n'était réellement visible pour l'identifier. Il ne reste qu'un regard et peut être un souvenir rapide du reste de son visage dévoilé un court instant le temps de boire une boisson chaude à l'incroyable miel.


Posant immédiatement son bouquet inachevé sur le comptoir, le fleuriste se jette sur l'ordinateur de la boutique pour rechercher les informations clients. S'il ne trouve pas de nom en lien avec le mystique des essaims, un autre nom du coven des enfants des vergers apparaît. Prenant le téléphone fixe pour composer le numéro, Lucius sourit et se présente au téléphone. Echange quelques banalités avec la personne, avant de demander :

« Dites moi, est-ce que vous auriez contact avec le mystique des essaims ?... Oui ?... AH, très bien. Vous pourriez lui demander de venir à la boutique s'il vous plaît ?... Oui, j'aimerai offrir une plante pour les abeilles, afin de vous remercier de votre fidélité. J'ai une magnifique phacélie. Il faudra attendre les beaux jours pour la floraison, mais je vous assure que les abeilles adoreront son pollen. »

Oh, ça va lui coûter un bras cette histoire. Le plan de Phacélie qu'il a en tête est imposant et vaut assez cher. Une variété spéciale, altérée par un botanomancien renommé pour justement, produire plus de pollen. Il n'a même pas d'assurance que ce type soit réellement le mystique des essaims... Mais en étant lié au miel, ça le rapprocheras au moins. Ou du moins, c'est ce que Lucius espère. Qu'on pourra lui donner un nom en échange du cadeau qu'il s'apprête à faire. Une fois le rendez-vous convenu, la personne lui affirmant que le mystique passera en fin d'après midi récupérer la phacélie, le fleuriste se mord la lèvre en sortant sa carte de crédit. Débite son propre argent pour payer la plante, qu'il ramène ensuite en sécurité derrière le comptoir. Merde, deux cent pounds d'un coup ce n'était pas prévu. Mais... C'est la seule piste qu'il ait, pour identifier le petit ami mystère de Moira.

De l'espoir avec cette histoire de miel lui étant revenue en tête, et deux cent pounds en moins.


Crédits ; yookihhhoney & jaegraph

TW : Sans

Etendu dans son canapé, Haesik regardait fixement le plafond. Epuisé, il était rentré chez lui avec l’intention de faire une sieste rapide mais il n’avait pas été en capacité de trouver le sommeil, pas plus que les trois nuits précédentes.

Foutues fiançailles…

L’union prochaine de Moira avec le fils Karlson était, sans surprise, la cause de ses insomnies répétées. Ils s’étaient mutuellement juré de faire tout ce qui serait en leur pouvoir pour saboter l’arrangement entre les deux familles mais, bien qu’ils aient même été jusqu’à commencer à élaborer des plans d’actions, le jeune homme n’était pas dupe.

Malgré la force de leur amour et leur détermination, leurs chances de réussite demeuraient faibles.

Combien de temps avaient-ils seulement, pour agir ?

La belle brune semblait penser que plusieurs mois s’écouleraient avant que le mariage soit officiellement prononcé, mais la menace était telle que l’incertitude en devenait torture.

Des coups virils, portés à sa porte, l’avaient brusquement tiré de ses pensées parasites.

Une seule personne pouvait marteler sa porte avec si peu de précautions : Eoghan.

Comme souvent lorsqu’il le sentait mal dans sa peau, il s’était engouffré dans son salon, sans même prendre la peine de se déchausser, avant d’aviser un exemplaire du journal mentionnant l’évènement qui l’avait tant contrarié, resté sur sa table basse depuis sa parution.

- Faites comme chez vous, je vous en prie…

La mauvaise humeur du coréen était palpable et, pourtant, une part de lui appréciait le soutien, bien que maladroit, de son prédécesseur et ami.

Eoghan : Arrêtes de t’abrutir avec ce torchon, ce n’est pas en usant ces lignes avec tes yeux que tu les feras disparaitre !!

Sans prêter aucune attention à la protestation de son ancien apprenti, il avait envoyé le quotidien brûler dans la cheminée.

Eoghan : J’ai reçu un appel d’un type qui travaille à la symphonie verte. Visiblement, ils veulent nous faire don d’une phacélie. Vas la chercher, ça te changera les idées !

Il fallait traverser tout le quartier pour parvenir jusqu’à cette boutique mais l’asiatique s’était mis en route sans rechigner outre mesure. Il savait que ses butineuses affectionnaient particulièrement cette plante mellifère et le vieillard avait raison : l’excursion aurait au moins le mérite de lui changer un peu les idées.

Une fois sur place, il avait poussé la porte de la boutique sans cérémonie particulière mais il s’était momentanément figé en croisant le regard de la personne qui se tenait au comptoir.

Ce type…

Bien qu’il n’avait pu apercevoir que brièvement son visage le jour de la fête de l’hiver, il l’avait immédiatement reconnu. Les grandes perches aux yeux en amande n’étaient pas si communes, en Ecosse.

Il s’agissait de l’homme qu’il avait trouvé étalé devant Moira, malheureux timide qu’elle avait incendié pour avoir mis sa tenue en péril. Malgré ce crime de lèse-majesté, il avait fait preuve de sympathie à son égard mais, ce jour, il s’était senti quelque peu embarrassé de se retrouver en sa présence…

- Bonjour.

L’inconnu faisait partie de ceux qui savaient pour Moira et lui et il souhaitait à tout prix éviter questions gênantes et regards compatissants.
Toutefois… Bien qu’il ignorait encore la nature exacte de leur relation, il l’avait également vu côtoyer une personne impliquée dans l’affaire, le sinistre fils Karlson.

A son grand dam, il ignorait tout de cet individu, fiancé à l’élue de son cœur. Peut-être tenait-il là une occasion d’élargir quelque peu ses connaissances ?

Fidèle à son habitude, consciente de la réserve de son sorcier, Dalsoon avait pris les devants.

Dalsoon : Votre ami le spectre s’est remis de ses émotions ?

Elle était restée vague à dessein, laissant à Lucius la possibilité de penser qu’elle évoquait soit la bataille de la fête de l’hiver, soit l’annonce de son mariage forcé.

Le coréen lui avait jeté un regard ennuyé mais il s’était tenu prêt à réceptionner et à analyser les émotions que l’intervention de son familier feraient naître chez leur interlocuteur… Crédits ;

Quand la clochette de la porte d'entrée sonne, Lucius relève le nez de ses feuilles de commande qu'il organisait proprement afin d'y voir plus clair. S'il s'attendait à un client ordinaire, c'est finalement une bonne surprise. Probablement. Son cœur manque un battement en reconnaissant l'homme qui vient d'entrer dans la boutique, en compagnie de son familier. Un gros loup blanc qu'il reconnait sans mal aux côtés du zoomancien. Son intuition était la bonne, le miel était la piste à suivre et soudainement, il regrette un peu moins les deux cent pounds dépensés. Il s'efforce de sourire, en saluant poliment le client venant de rentrer. C'est sans doute un peu gênant, pour l'un comme pour l'autre de se recroiser comme ça subitement. "Comme de par hasard." Peut-être que Lucius se montreras honnête, lui révèleras son petit stratagème. Mais la vérité ? C'est que le fleuriste n'a pas vraiment réfléchi à la suite de son plan.

Heureusement, il peut compter sur le familier pour rompre cet échange de regard gênant. Le voilà qui rigole au surnom que donne la louve à Nero, le spectre... ça lui va comme un gant, bien qu'il ne soit pas nécromancien.

« C'est un peu compliqué pour lui en ce moment. Mais pour les boules de neige, il s'en est remis puisqu'il affirme avoir gagné. »

Lucius n'a pas eu le courage d'argumenter. Parce que premièrement, ça lui importe peu. Il n'a jamais vraiment eu l'esprit de compétition, ne fait pas souvent preuve d'individualisme. Et aussi, parce qu'il ne veut pas contrarier Nero. Si ça lui fait plaisir de se dire qu'il a remporté la grande bataille de grass market, pourquoi pas ? On ne s'en souviendras pas d'ici quelques années, ça ne laisseras pas de trace dans les livres d'histoires et au final c'était juste un jeu enfantin pour quelques adultes perdus dans le chaos. Des adultes qui le temps d'un instant ont pu retrouver leur âme d'enfant.

« C'est compliqué pour tout le monde. »

Pour le zoomancien aussi. Et sans doute son familier dont il semble être très proches. La plupart des sorciers sont proches de l'animal qui partage leur âme. Jager lui aussi préfère souvent passer du temps avec son chat plutôt qu'avec d'autres personnes. Mais il semblerait que le mystique des essaims ne se sépare jamais de sa louve. Nuggets lui, est bien trop fainéant pour quitter son canapé confortable et accompagner son sorcier à la boutique. Même si dans l'absolu, il pourrait être facilement transporté. Un chat à poils longs ce n'est pas le familier le plus étrange ou encombrant qui soit. C'est même suffisamment banal pour qu'il n'ait pas besoin de cacher son existence aux humains tant l'animal qui l'accompagne est commun.

« Je... Je m'appelle Lucius, d'ailleurs. »

Autant mettre un nom sur un visage, n'est-ce pas ? Un peu empoté, le voilà qui attrape son pot de phacélie pour la déposer sur le comptoir. Poussant légèrement sa plante sur le côté pour pouvoir continuer de voir le zoomancien sans avoir à l'espionner à travers le feuillage, il se racle la gorge et penche pour l'honnêteté. La boutique est déserte, personne n'est vraiment venu aujourd'hui et les clients n'étaient pas nombreux. La tendance de la journée est au calme et c'est tant mieux puisque Jager est seul dans le magasin cet après -midi.

« J'ai repensé au miel. Alors... Je me suis dit que vous étiez peut être en contact avec le mystique des essaims dans votre coven. Mais de ce que je comprend, c'est vous qui occupez le poste ? »

Bonne déduction de l'Oniromancien qui ne sait pas par où commencer ses explications. Il n'aime pas mentir, Jager. N'a jamais été du genre à cacher la vérité, parce que ça n'apporte généralement que des soucis. Pourtant, il ne peut pas se montrer totalement honnête dans sa démarche. Il vaut mieux continuer à croire que le spectre et lui ne sont que des amis, c'est mieux ainsi. Personne ne doit savoir qu'ils sont amants, Nero a été clair sur ça et plus jamais le fleuriste ne veut voir la panique s'installer chez son amant. Evoquer la possibilité de mettre le petit ami de Moira dans la confidence a pris des proportions qu'il n'aurait jamais imaginé. Face à la nature anxieuse de l'Aéromancien donc, Lucius garde le secret.

« J'aimerai aider. Si je peux faire quoi que ce soit. Que ce soit vis à vis de Nero, de Moira ou de vous... Parce que personne n'est heureux. On devrait tous pouvoir sourire sincèrement sur nos photos de mariage et si ça arrive... les sourires seront crispés et forcés. »

Il y a beaucoup de choses que Lucius ne peut pas dire sincèrement au Zoomancien. Mais jusqu'à présent, se fier à ses intuitions a porté ses fruits. Et son instinct lui dit qu'il peut lui faire confiance, qu'il est une bonne personne et ne voudra pas faire de mal à qui que ce soit dans cette histoire -et ce malgré la forme impressionnante de son familier.

« C'est calme dans la boutique, et j'ai beaucoup de choses à avouer. Est-ce que vous voulez un café ? On a une machine dans la salle des employés. »

Il n'est pas censé faire ça mais qu'importe. Son employeur n'en saura jamais rien et un café, ça n'a jamais tué personne ? Il doute que le mystique des essaims tenteras de voler le tiroir caisse.
Crédits ; yookihhhoney & jaegraph