I don’t want to be here but I have no choice ft  Ethel Hasting

TW : décès

Il sent, à la seconde où sa nouvelle patiente rentre dans son bureau, qu’elle ne va pas lui faciliter la tâche. Ethel n’a pas un sixième sens qui lui permet de repérer les esprits réfractaires avant même qu’il n’ouvre la bouche mais, quelque chose dans son expression, dans sa façon de se mouvoir et même de se tenir, lui laisse entendre qu’il va devoir batailler pour obtenir des miettes. Il n’en éprouve pas une grande contrariété — de la lassitude peut-être, mais le psychologue est trop habitué à devoir défendre sa branche scientifique pour s’étonner des murs qu’on dresse encore devant lui. ’’Je vous en prie.’’ refermant la porte après son passage, il pivote sur ses jambes pour réaliser qu’elle s’est déjà installée à sa convenance, et il en fait donc de même, prenant place sur le canapé qui fait face au sien. Il s’apprête à lui délivrer sa formule habituelle, que tout ce qui se dira ici restera entre ces murs, qu’il n’est pas là pour juger ou l’obliger à parler mais, elle le devance en lui faisant lentement hausser les sourcils sur son front. “Ce n’est pas contre vous mais je dois avouer ne pas avoir envie d’être ici mais de pas avoir le choix donc me voilà.” ce n’est pas contre lui mais elle déploie des efforts colossaux pour signer son mécontentement — un mécontentement dont il n’est pas responsable, et il se formule l’idée que ce besoin exacerbé de marquer son sentiment est sûrement dû au fait qu’elle n’a pas l’impression d’être entendue à sa juste mesure. Dans son travail ? Dans sa famille ? Dans son enfance ? Cela reste à déterminer mais il décide de ne pas attaquer de front, songeant que ce serait totalement stérile. ’’Je peux vous demander pourquoi vous n’avez pas envie d’être là ?’’ autant savoir quelles idées préconçues il doit déconstruire avant d’espérer avoir un échange constructif avec elle. Il est clair qu’elle veut donner l’impression d’une femme forte qui n’a pas besoin des autres pour surmonter les traumatismes — et il ne remettrait pas cette image en cause puisqu’il ne la connait pas suffisamment, mais il n’a aucun doute sur le fait qu’avoir enterré plusieurs de ses coéquipiers l’a forcement atteint d’une façon ou d’une autre. Dans le cas contraire, il est certain qu'elle ne sera pas venue pour rien non plus.

crédits/ttenvely&dejjavus

TW : décès

“Disons que je ne trouve pas nécessaire de me faire perdre mon temps à faire ces heures de psy alors que je pourrais continuer à travailler.” évidemment il n’est même pas surpris d’entendre ce prétexte presque aussi vieux que son domaine d’expertise, Ethel, puisque l’idée même d’aller voir un.e psychologue souffre encore de vieilles théories farfelues, qui rendent sa concrétisation presque honteuse. C’est au moins un point commun entre les sorciers et les non-sorciers : personne ne concède à faire soigner son esprit mais, comme le professionnel est lui-même dans un déni peu commun concernant ses propres blessures internes, il ne s’en formalise pas trop. ’’Je vois.’’ il ne la nargue pas, ne porte aucun accent coléreux dans la voix, se contente d’hocher son menton de haut en bas en tapotant tranquillement le bout de ses doigts contre la bordure de son fauteuil. ’’Quand c’est votre corps qui est malade, vous allez voir un docteur, n’est-ce pas ?’’ à moins qu’elle soit tellement réfractaire aux médecines pour faire l’impasse sur celles-ci aussi mais, il en doute ’’C’est la même chose, ici. Mais ce n’est pas votre corps qui a besoin de soin, c’est votre esprit.’’ il ne sait pas vraiment si cela sera suffisant pour la convaincre mais… C’est la première perche qu’il tend en espérant qu’elle accepte de la saisir. “Ce n’est pas pour paraître sans coeur mais ce n’est pas la première fois que je perds un équipier et je sais comment réagir, je l’ai bien appris et bien travaillé à ce point là pendant l’armée” il ne doute pas du fait qu’elle soit sincère quand elle énonce ce qui est sa vérité, il accueille même l’information en hochant son menton de haut en bas sans changer de posture ’’Que vous a-t-on appris, lorsque vous étiez à l’armée, concernant le processus de deuil ?’’ il a envie de savoir quels sont les mécanismes qu’elle emploie pour palier aux deuils successifs subis, car peut-être peut-il rajouter sa pierre à l’édifice. C’est bien pour cela qu’ils sont là, non ?

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