pride (in the name of love)

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Le trajet pour rejoindre le bar se fait dans un espèce d’état semi-euphorique hérité de la marche des fiertés, mais aussi d’un relent de malaise au creux des côtes de l’italienne. Triste à dire, mais dans tous ces moments où elle sentait Romeo de trop, il aurait été un soutien efficace dans cette situation improvisée. Parce que ses émotions s’entrechoquaient comme ses pensées dans cette boîte crânienne - et qu’on aurait eu tôt fait d’avouer vide, ou pas loin. Sans doute un retour d’ascenseur pour toutes les fois où Diana avait été exécrable avec son familier, sinon indifférente à ses ressentis. Y’a même une pensée qui se démarque, qui fait son chemin : faut qu’elle s’excuse auprès du rhino. Manque de bol, c’est de l’autre côté du portail qu’il se trouve, et elles viennent à peine de le franchir.  

S’excuser devant tout le monde, en plus ? Wah, jamais.

“J’dois aller chercher mon… bref, Romeo, il est pas loin ton familier, à toi ? ‘Fin, je sais pas… s’tu voulais…” parce qu’elle l’a invité un peu à la sauvette, il faut bien l’admettre, et Diana a paniqué à sa manière en déballant tout son programme pour la suite et fin de la journée : se poser dans un bar sorcier où s’était donné rendez-vous lesdits sorciers de la communauté qu’iels fêtaient toustes aujourd’hui. Elle se racle un peu la gorge, lève le nez et aperçoit le rhinocéros blanc qui lève le nez cornu. Dieu qu’il a l’air encore pataud aujourd’hui. “Euh, c’est lui” Arrête de lâcher des euh de môme là, gronde t-elle contre ses tempes, faisant de grands signes au familier pour qu’il les rejoigne dans leur marche vaguement cadencée.

“T’avais rien d’prévu, t’es sûre ?” lâche t-elle en se retournant vers Aphrodite, qu’elle n’ose jamais vraiment fixer trop longtemps. Imaginez l’angoisse ? Et si elle captait ? Aujourd’hui, qui plus est ? “J’reste pas plus d’une heure moi j’pense maissituveuxresterpluslongtempsjteramèneraismaistespasobligéeok” le rhino est à portée et s’adresse poliment à la botanomancienne, les tirant probablement d’un fort moment de gêne. “Oh, Aphrodite ? Bonsoir !” Fait pas genre tu la connais plus que moi hein, envoie t-elle par télépathie à son familier, qui lui répond quant à lui par un petit regard innocent. Je ne fais pas genre, Di, et s’il y en avait bien un qui avait comprit depuis le début ce qui se tramait avec cette personne, c’était bien lui. “Ah, c’est là !” qu’elle pointe du doigt une terrasse improvisée en dehors d’un bar authentique à souhait. L’intérieur, lui, devait être bondé ; et ça tombe bien, Diana ne tenait pas tant que ça à laisser Romeo dehors. C’est qu’il a encore son rôle à jouer dans cette surprenante entrevue.

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“Elle est chez moi, mais en général, elle fait toujours par faire un tour dans les environs. Elle finira par nous rejoindre, je pense.” Toujours plus rapide que Romeo. “Oui, t’inquiète. J’ai la soirée de libre. Ça me changera de la routine de la tisane et de la série au fond du canapé !” C’est bien aussi la tisane au fond du canapé. Bon sauf pour moi, c’est vrai. On est mieux dehors quand même. “J’serais toute à toi pour la soirée si tu souhaites rester plus longtemps. Comme je disais, ça me changera. Ça me fera un grand bien de me sortir un peu. - Ouais parce que j’vais pas te laisser traîner vers Cougait si ça tarde, t’as compris” c’est dit un peu plus bas et avec de bonnes intentions, même si la forme n’y est pas vraiment - le côté directif prenait bien souvent le pli avant tout le reste, même si ça se voulait être gentil, rendait Diana parfois encore moins avenante (ce qui n’était pas nécessairement sa meilleure qualité de sorcière). Sans doute que le long drapeau accroché à son cou et déroulant sur son dos aux couleurs violettes, noire et blanches, un labrys en son centre. De quoi garder l’aspect martial même là où l’amour s’épanouissait tout autour.

Aphrodite prend les devants après l’établissement indiqué non moins franchement et les deux femmes se rapprochent d’une tablée que la botanomancienne a choisi en conscience. Diana est encore debout quant à elle, lâchant un vieux “On parie combien que j’vais encore péter la chaise” qui ne manque pas d’un sourire sur ses traits, ni d’un rire de gosier bien dosé. Ca tombe bien, la sorcière lui offre la première tournée et aller chercher le nécessaire était tout indiqué, par principe. “Ca paie bien danseuse de l’aube, hein ?” Blague à part. Romeo s’est quant à lui installé lourdement à côté de leur tablée. La zoomancienne se reprend. “J’te prends quoi ?”

Commande passée auprès de la concernée, Diana s’enfonce non moins franchement dans les entrailles du bar, seule, pour aller chercher le nécessaire. Comme dans beaucoup d’établissements par ici, on était pas servi en terrasse, fallait prendre ses jambes pour aller faire la manche au barman ou à la barmaid. Barmaid, aujourd’hui, quelle hèle et déroule sa petite liste. Supplément : “T’as pas une gamelle ou un bon seau pour mettre de l’eau dedans ?” ce à quoi on lui demande pour quoi faire, et le terme familier se suffit à lui même.

Pendant ces deux minutes et quelques d’interlude, Romeo, lui, s’est adressé à Aphrodite, avec tout le respect qu’on lui connaissait : “Diana est contente de te voir, j’espère que tu ne prendras pas mal ses mots, elle est parfois maladroite” les yeux du rhino sourient doucement tandis qu’il laisse son regard cueillir les environs, avec la lenteur sage de ses semblables. Et dire qu’on continue de penser que les lions sont les rois, là où il leur fallait tout un conseil pour pouvoir les guider en bonne et due forme.

La concernée finit par revenir, l’anse d’un seau lourd d’eau coincé dans le creux d’un bras, et tenant les deux boissons dans chacune de ses mains. Quelqu’un la reconnait et la salue, ce qu’elle lui rend d’une façon fort familière, avant de reporter son attention sur ses priorités : déposer les boissons sans rien renverser.

“Voilà” qu’elle dit après avoir déposé celle d’Aphro, en fait de même avec la sienne, a la présence d’esprit de se reculer avant de relever à nouveau les bras - le seau aurait eu tôt fait de faire renverser la table toute entière. “J’ai testé elle est fraîche - Oh, c’est gentil Di, merci” à croire qu’elle faisait plus d’efforts pour lui ces derniers temps qu’elle n’en avait jamais fait ces dix dernières années. Peu importe, on était pas là pour faire le bilan.

Elle s’assied, la chaise en souffrance, en témoigne les sons caractéristiques qui avaient réussi à faire leur chemin malgré le brouhaha qui pouvait les entourer. Ce n’est qu’une fois placée que Diana réalise qu’elle se trouve être seule avec… oh bon sang de… “Allez, euh, on trinque ?! A nous !” Enfin, à leur fiertés, mais ça restait un très bon moyen de le dire ainsi, n’est-ce pas vrai ? Après un mouvement qui ne défiera pas le naturel, la zoomancienne prend une gorgée de sa boisson. “Putain en plus il fait beau, quelle putain de belle journée là !” sorti du cœur, mais pas sans oublier qu’elle était accompagnée de quelqu’un qui était loin d’avoir un ascendant charretier.