Peryn Tanner ⨳ I of the Storm

Sa première réalité est l’inconstance. Imprévisible, on a souvent du mal à le qualifier, tant le sorcier est semblable aux marées. Il a des défauts qu’il gomme parfois et des qualités qu’il tait, un jeu mis en avant par des personnages qu’il endosse sans être jamais totalement lui. Peut-être est-il incapable de s’accepter pleinement et froidement. Peut-être s’est-il construit en imitant, trop conscient de son intelligence sociale défaillante et des règles sociales trop nombreuses et trop subtiles pour lui. Au fond, Peryn essaye toujours de s’adapter.

Timide et réservé de nature, il peine généralement à aller vers les autres : premier pas qui a besoin d’être franchi pour qu’il se sente peu à peu en confiance. Le regard des autres est toujours très important pour lui, quoi que laisse paraître son anticonformisme : il a profondément besoin de se sentir à sa place et d’être estimé – à défaut d’être aimé – pour ce qu’il est. Il n’aime pas cette vulnérabilité, mais n’a jamais su s’en défaire vraiment. Ce n’est cependant pas souvent ce besoin égoïste qui le pousse vers des inconnus, mais la sincère curiosité, l’intérêt réel pour d’autres êtres, d’autres visions, d’autres vécus.

Paradoxalement, ses années de service en cuisine l’ont rendu accroc à l’adrénaline, et tête brûlée quand il embrasse cette facette pleine d’assurance pour couvrir son palpitant paniqué. Peryn connait la toute puissance d’un coup de feu, ce sentiment d’être invincible, immortel, de tout pouvoir encaisser, pouvoir éclater le monde s’il le voulait. Il n’a pas peur des conflits avec les personnes qui ne lui sont pas proches, et est capable de faire les pires conneries ou provocations irrévérencieuses pour aller en chercher. La confrontation est un moteur dont il a besoin pour se sentir vivre.

Peryn chemine un fil ténu finalement, entre une spontanéité parfois dangereuse qu’il ne maîtrise pas et son besoin de contrôler et analyser. Il n’est pas une uniformité logique mais un bordel vrombissant.

7 Juillet 1992 : Naissance de Peryn à Austin, Texas, USA. Fils unique, ses parents tiennent un "espace collaboratif" café-librairie-brocantes-antiquités. Ce lieu aux influences hippies berce son enfance, lui petit garçon fasciné par les étoffes et motifs colorés qui meublent son terrain de jeu, et la variété des rencontres qui s’y font, entre simples instants de détente, débats politiques, concerts et conférences littéraires.

1998 : 6 ans. Peryn commence sa scolarité à l’Académie d’Austin. Le cadre dans lequel on lui explique la nature de ses pouvoirs et où on l’accompagne dans cette découverte de soi le rassure, et il se plait à fréquenter des sorcières et sorciers de son âge, lui plus habitué aux adultes et aux anciens. L’enfant se construit son imaginaire et ses premiers rêves éclatants : il sera un grand sorcier plus tard, et rendra les siens fiers de lui. Il domptera la tempête.

2002 : 10 ans. Le garçon se confronte pour la première fois à la différence et au jugement de ses pairs. Quand la journée est finie ou que le week-end vient, Peryn est un des seuls à ne pouvoir jouer avec les autres et son familier – son bel Helium réside à ce moment-là dans une piscine d’eau salée pour les animaux marins trop grands pour vivre ailleurs. Ce détail est le premier d’une liste qui s’enrichira d’année en année, le poussant peu à peu à l’écart de peur du jugement. Peryn est un garçon étrange.

2007 : 15 ans. L’adolescence est douloureuse. L’envie de se faire une place et de devenir un mec normal avec sa bande de potes est plus forte de jour en jour, mais Peryn porte les marques de ces dernières années. Outre son intelligence sociale bancale, il n’arrive pas bien à comprendre ses émotions qui se lient et s’emmêlent, et empire les choses à chaque fois qu’il tente d’utiliser ses pouvoirs pour influencer les autres et se faire une place. La colère, finalement, est la seule constante, la seule force à laquelle se raccrocher vraiment. Une rancœur tenace s’installe à cette période, contre ce monde qui ne semble pas vraiment vouloir de lui, cet espace dont il ne peut pas vraiment partir, ses parents fantaisistes et lunaires, le putain de corps de phoque d’Helium.

2010 : 18 ans. Peryn obtient laborieusement son diplôme final, et ne rêve que de s’émanciper enfin. Ses parents acquiescent, persuadés que cela lui fera du bien. Le jeune homme quitte l’Austin sorcier et chemine le long de la côte Est, travaillant d’abord de bar en bar jusqu’à une rencontre avec un cuisinier qui lui propose de le prendre sous son aile, persuadé que cet univers peut l’aider à se canaliser. La révélation est immédiate pour Peryn, confronté pour la première fois à une réalité brute : le travail de la matière. Lorsqu’après un service éprouvant Peryn sort se griller une clope et qu’il découvre les mines heureuses de certains clients, il réalise effleurer sa voie du bout des doigts. D’une certaine manière, il peut faire du bien sans utiliser ses pouvoirs.

2012 : 20 ans. Le jeune homme obtient une place de commis de cuisine dans un restaurant branché de Boston. Il y apprend la rigueur d’une brigade, avec ses codes et son exigence, les engueulades et les rapports de force, l’adrénaline toute puissante d’un vrai coup de feu. Son intérêt mue en passion, dans la découverte de nouveaux produits et de nouvelles techniques, la créativité et l’élévation d’un savoir-faire à une forme d’art. La passion se fait dévorante, intense et destructrice, sa gloire dans la sueur et ses défaites dans l’alcool, la perdition, l’oubli.

2015 : 23 ans. Peryn décide de partir en France pour continuer son apprentissage. Helium l’empêche de s’éloigner de trop de la côte ou s'installer près de l’Océan Atlantique, trop chaud. Ce sera la Normandie alors. Les chefs sont exigeants, et s’il découvre beaucoup, Peryn a aussi du mal à rester à un endroit. Pendant quelques années, il enchaine les restaurants et les découvertes. Se fait ses propres armes.

2018 : 26 ans. Obtient un poste de demi-chef de partie dans un palace à Amsterdam, puis un poste de chef de partie. Avec les responsabilités viennent les vagues de pression, toujours plus fortes, et les coups de gueule, portes cassées. En dehors du travail, Peryn sombre peu à peu dans une forme de quête à la stupeur. Lentement, son environnement se fait toxique, et les coups bas de plus en plus nombreux. Viennent les humiliations, les reproches et les moqueries envers celui qui semble si proche et si fasciné par l’eau, comme une autre faiblesse, une anomalie. Il encaisse autant qu’il peu mais craque dangereusement un soir où il manque d’utiliser ses pouvoirs contre son supérieur. Conscient d’avoir atteint ses limites, Peryn disparait et retourne à Austin.

2020 : 28 ans. Période chaotique. Brisé par sa dernière expérience, Peryn revient auprès de son coven et tente d’y reprendre une place, à la recherche peut-être de réconfort ou d’acceptation. Soucieux de ses crises et pertes de contrôle, plusieurs des siens cherchent à tempérer ses humeurs sans vraiment chercher à le comprendre – creusant, par ces gestes bienveillants, un fossé entre eux. Il ne veut pas de pitié et certainement  pas qu’on touche à ce qu’il ressent. Le sorcier se renferme une nouvelle fois dans un sentiment d’impuissance et d’inutilité, seul face à ce besoin d’action qu’il n’arrive pas à concrétiser. Il ne se fait plus confiance pour vivre au milieu d’humains mais sait qu’Austin ne pourra jamais être son futur, pour toute l’amertume fluctuante ici, la souillure des actes passés. Alors, quand on lui propose un poste de chef dans un restaurant de Rotterdam sorcier, il décide de tenter à nouveau sa chance.

2021 - 2022 : 29 à 30 ans. Soucieux de ne pas répéter avec autrui les traitements infligés par nombre de ses supérieurs, Peryn tente de monter une brigade talentueuse et d’évoluer avec eux dans un environnement de travail sain, de respect, malgré les enjeux et la pression. Sa créativité se libère quand il se réinvente en employant ses pouvoirs en cuisine, en influençant les sens de ses convives pour les surprendre ou les choquer, et le succès ne se fait pas attendre longtemps. La salle ne désemplit pas. Ses crises de colère se font moins fréquentes et il parvient à construire à côté, en couple pour la première fois avec une sorcière. Cette voie est la bonne, il le sait, il le sent. Au fil des mois, on semble en attendre toujours plus de lui, figure montante qui passe dans les journaux, à qui on demande désormais des conseils, que l’on considère. Faire mieux, pour que cela continue. Donner plus. Aller plus loin. Se perdre aussi, au passage, ne plus savoir, divaguer. La perdre, quand elle lui reproche de ne plus avoir sa place. Trop vite alors, trop fort, trop haut ? Quelle est sa place alors, s’il n’y arrive toujours pas, après tant d’efforts ? Qu’est-on quand on a 30 ans, quand on ne sait plus ce qui est bon, pour soi, pour les autres, qu’on a toujours pas trouvé sa route, celle qui doit aller à peu près droit normalement sans nous fracasser en chemin ? Démuni, Peryn esquisse un sourire et prétend chercher de nouveaux projets ailleurs, un temps pour se recentrer.

2023 : 31 ans. Arrive à Edimbourg sorcier, comme un retour aux origines, celles qu’il ne connait pas. Ses grands parents ont dû connaître ces rues. Y trouver la force pour en tirer quelque chose de beau. Un nouveau départ alors, encore, parce qu’on ne peut que se relever. Il y a eu du mieux, après chaque crise, après chaque échec. Pourquoi ne pas arriver à vivre, maintenant ?

Des tatouages comme rite de passage, étapes à marquer ou simples envies spontanées ~ Spécialiste de la bredouille et du regard qui fuit, dans la vie / assurance affichée en cuisine, personnage endossé pour supporter ~ Rêve de chauds rivages et de déserts lointains ~ Addict au café, souvent oublié dans un coin et froid ~ Le surf comme échappatoire, toujours en compagnie d'Helium ~ Des questions plein le cœur mais des lèvres muettes, corps qui parle plus que les mots ~ Grand adepte de dérision ~ Ne cuisine jamais pour lui et se contente généralement de nouilles réhydratées, d'un steak trop cuit ou d'une grande quantité de laitages ~ Se méfie beaucoup plus des hydromanciens que des autres sorciers ~ A tendance à avoir une très bonne mémoire pour des choses de moindre importance et à oublier ce qui ne devrait pas l’être