From light comes darkness, and from darkness light
13/04/2024
Lucius a fait un effort considérable aujourd'hui. Nero lui a fait un cadeau, qu'il ne peut pas réellement refuser pour son anniversaire le mois dernier. Il a fallu trouver un moment qui convenait aux deux parties, pour établir d'un rendez-vous. Un mois après ses vingt neuf ans, mais qu'importe, c'est aujourd'hui que le petit poisson* devenu grand doit y aller. Ayant laissé de côté ses habituels vêtements décontractés qu'il aborde lorsqu'il n'est pas au travail, le fleuriste a fait l'effort de mettre un pantalon à coupe droite ainsi qu'une chemise. Il n'a pas envie qu'on le regarde trop de travers, lorsqu'il se rendra chez le tailleur. Pourtant, il sait bien qu'il y aura peut-être du jugement. Ce sont des gens qui viennent du même milieu que Nero, qui se rendent dans ce genre de lieux. Lui naïvement pensait qu'il était bien habillé en allant chez Uniqlo ou H&M afin de se fournir - comme il le peut, étant donné sa taille imposante. Mais non, ça reste une dégaine de prolétaire aux yeux des gens bien nés comme son amant. Alors, il appréhende ce rendez-vous. Se questionne soudainement en se demandant s'il a bien fait de venir avec un semblant de pantalon chic et une chemise. Peut-être qu'il aurait du mettre un col roulé en haut ? Ou un jean en bas ? Il est trop tard, Lucius n'a plus le temps de retourner se changer chez lui de l'autre côté à Old Town. Le passage est un peu encombré pour les voitures que l'on contrôle de manière aléatoire afin de s'assurer que personne ne fait de contrebande d'objets magiques de l'autre côté. C'est un vrai business, si celui-ci est toléré à Salem où beaucoup de sorciers se font un extra en arnaquant les touristes humains (jouant sur l'histoire tristement célèbre de la ville), ici ça ne plaisante pas. Encore moins depuis que l'ordre de Saint Patrick semble avoir repris ses activités. Tout le monde est inquiet, l'ambiance devient plus tendue et même paranoïaque pour certains.
D'un naturel anxieux, il est déjà garé dans la rue indiquée. Tapote sur son volant en se demandant à quel point il peut être en avance sans que ça ait l'air étrange, tout en chantonnant sur l'air sortant de son autoradio*. Une heure, c'est trop. Il a donc attendu une demi heure de plus dans sa fidèle Kia, avant de se décider à sortir de là. Il fait bon, en ce mois d'avril : le Printemps* accompagné de ses bourgeons* arrive, le parfum* des fleurs est plus prononcé et ça fait du bien à tout le monde d'avoir enfin un peu de soleil. Même lui apprécie qu'il fasse un peu plus chaud, sans avoir pour autant besoin de déjà ressortir la crème solaire indice quatre vingt dix pour ne pas être brûlé vif.
Poussant la porte du tailleur, il est accueilli sans avoir le temps de dire quoi que ce soit. Oui il est en avance, et s'excuse immédiatement en bafouillant :
« Oui, excusez-moi. »
Qu'importe, on va chercher Cora ou Coraline, il ne sait pas trop. Il n'avait d'ailleurs pas remarqué l'autre client présent, un dénommé Monsieur Matthews. Ici tout le monde s'appelle par son nom de famille. Il a appris avec Nero que c'était une fierté pour les gens de ce milieu, que c'était la norme et bien plus poli que d'utiliser un prénom. Jager est pourtant perturbé de ne pas être appellé Lucius par son petit ami, étant donné la relation qui les lie. Adressant un sourire poli mais timide au Monsieur Matthews donc, Monsieur Jager se retiens de rougir lorsqu'il lui adresse la parole. Oh, il voudrait disparaître. Il s'est fait remarqué et il n'apprécie pas forcément qu'on lui accorde trop d'attention. Mais il veut sans doute être poli, ne pas rendre ça bizarre en restant silencieux. ça aussi, c'est quelque chose que Lucius ne comprend pas toujours. Pourquoi les gens veulent à tout prix meubler le silence ?
« C'est la première fois que je viens chez un tailleur, oui... »
Est-ce que c'est si évident que ça ?... Sans doute oui, quand on a l'œil on doit pouvoir reconnaître que ses vêtements sont du prêt à porter.
« C'est un cadeau que l'on m'a offert pour mon anniversaire le mois dernier, on m'a un petit peu expliqué comment ça allait se passer. Ma petite amie m'a aussi dit beaucoup de bien du travail des Bergsen. »
Et l'autre client confirme, en appuyant qu'il vient ici depuis longtemps. Ah, vraiment, Lucius ne se sent pas réellement à sa place ici. Comprend enfin ce que Nero voulait dire : Lucius qui pensait être un jeune-homme poli et bien éduqué saisit toute la différence entre son milieu social et celui plus élevé des gens présents dans cette échoppe. Il n'est pourtant pas un rustre. Jure très rarement, dit toujours bonjour et merci et sait se montrer poli sans faire trop d'efforts. Jager est un gentil garçon, mais manque d'éducation. Ou du moins... N'a pas tous les codes qu'observent les gens nés avec beaucoup de pognon et de l'influence. Sa famille pourtant n'est pas pauvre, ils ne sont pas dans le besoin.
De l'autre côté de l'Atlantique à Salem, son nom est respecté et synonyme d'appartenance et de dévotion au coven des enfants des volcans. Lui est né avec la mauvaise magie, mais qu'importe : il reste l'un d'entre eux et l'un des petits enfants de l'ancienne Oracle. Ici, on les respecte aussi. Sa mère s'est mariée à un Médecin respectable, ils vivent simplement et sobrement à Leith, mais ont l'image d'une famille ordinaire et unie, toujours polie et prête à aider ses voisins. C'est pourtant une douche froide qu'il subit actuellement, en se rendant compte d'à quel point il fait tâche dans le décors ici.
Au moins, même s'il vient de mentir sur le genre de la personne lui ayant offert ce cadeau, celà offre assez d'informations à Monsieur Matthews : Lucius sort avec une jeune femme venant d'un milieu social plus élevé que le sien. Une jeune femme mystérieuse, à qui il n'a pas encore trouvé de faux prénom malgré le temps; car Nero n'a pas réellement d'équivalent contrairement à lui qui se transforme avec aise en Lucia.
Crédits ; Becky Jorgensen, Bella