[Terminé] But it was all problemo. - ft. Aydan

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Comme un lundi. Un putain de lundi, jour maudit où le réveil semble plus difficile que les autres. Encore enfariné, Ichabod attend devant la machine à café du salon de tatouage que sa deuxième tasse de la journée coule. Il s'en est déjà enfiler une ce matin chez lui, a pris son petit déjeuner - consistant en un café noir et une cigarette. Mais il n'est toujours pas parfaitement réveillé. Pourtant, il n'a pas fait grand chose hier. Dimanche est un jour de repos au Bad Decisions, lui n'a retouché rapidement qu'un projet client pour ce matin. Il n'est pas sorti faire la fête jusqu'à pas d'heure, n'a invité personne chez lui et n'a même pas vraiment bu. A l'exception d'une bière hier soit devant sa télé pour accompagner le burger qu'il s'était commandé, par flemme de réchauffer autre chose chez lui. Alors pourquoi la reprise est-elle toujours aussi difficile ? Pourquoi le Lundi est-il un jour plus terrible que les autres ?... Mystère.

C'est bientôt la fin du mois de Janvier. L'année commence et le premier mois de 2024 sera bientôt derrière lui. Pas qu'elle soit spécialement mauvaise pour le moment, mais elle n'est pas non plus excellente. Un départ moyen, sans véritable changement. La seule grande nouvelle, a eu lieu en décembre. Lors du repas de noël de l'élite, au quel il n'était bien entendu pas convié. Ce qui devait arriver arriva, et les parents ont enfin décidé de marier son frère aîné à une potiche quelconque. Il a vu les photos, comme tout le monde, sur je journal en passant devant un kioske. Sait que l'air sinistre de son frère, bien qu'il soit habituel, ne cache pas une quelconque joie à l'idée de se marier à une inconnue. Parce que les femmes, ce n'est pas vraiment son truc, à Nero. Il faudra trouver une solution à ce problème. Ichabod s'inquiète pour son aîné, tout en sachant qu'il ne peut pas vraiment intervenir. Parce que ça reviendrait à sortir de son trou, à revenir au grand jour, à dire coucou les Karlsson, je vous ai manqué ?. Alors qu'il s'efforce de ne plus avoir de contact avec cette foutue famille depuis plus d'une décennie.

Laissant son café couler, l'Aéromancien soupire en soufflant sur sa tasse. Regarde sa tablette graphique en zoomant sur le projet de sa cliente qui arriveras d'ici une heure. Il est en avance. Comme d'habitude, en réalité, Ichabod n'aimant pas perdre de temps au travail. Personne n'a encore mis de musique au salon, il semblerait que le lundi matin soit difficile pour tout le monde. Tant mieux. Car ça lui permet d'entendre la porte d'entrer et la clochette qui y est attachée. Sortant la tête de l'encadrement de la porte de la cuisine pour voir qui vient d'arriver, il se sent soulagé en voyant des boucles brunes familières qu'il sale d'un geste de la main au loin. Ce n'est que le p'tit Aydan. Pas un client qui arrive pour discuter d'un projet quelconque au shop.

Plus qu'à espérer que le jeune pyromancien ne vienne pas trop l'emmerder à peine réveillé.

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Ce matin, Aydan n'a décidément pas les yeux en face des trous. Le p'tit n'est pas super frais mais Ichabod ne s'alarme pas pour autant. Lui aussi à son âge avait l'habitude de sortir tard le week end. Terminait son travail étudiant le samedi soir, finissait au pub jusqu'à pas d'heure avec des amis. Récupérait tant bien que mal le dimanche dans un état comateux proche de celui d'un zombie, avant de devoir se lever le lundi matin pour reprendre à l'université. Il faut que jeunesse se fasse, et le tatoueur n'est pas du genre à blâmer les gens pour celà. Lui aussi a eu ses années folles. S'il est plus sage désormais, qu'il faut dire qu'à trente ans passés on n'a aussi plus autant d'énergie qu'à vingt ans, il se souvient néanmoins de manière nostalgique de ses années de fac. Le pire, c'était tout de même lorsqu'il reprenait à huit heures tapantes, le lundi matin après un week end de beuveries, avec la matière la plus chiante et soporifique du monde. A savoir, l'initiation au droit et à la gestion administrative.

Parce que l'Architecture ce n'est malheureusement pas que du dessin, ou de la physique pour savoir si le bâtiment va tenir le coup en cas de tremblement de terre ou juste rester droit et survivre à un gros coup de vent ou un éboulement de terrain. Il y a aussi tout un tas de choses un peu plus concrètes et terre à terre à prendre en compte. Comme l'aménagement du territoire, l'urbanisme, les lois propres à ces domaines là. A la fin des études, laborieuses, il y a finalement assez peu d'architectes diplômés qui auront la possibilité d'un jour participer à un projet de construction stimulant artistiquement parlant. C'est un peu pour ça qu'Ichabod a donc arrêté après trois ans. Lorsqu'il s'est rendu compte que ses chances de construire un édifice surréaliste, à l'image de la Sagrada Familia de Barcelone, au milieu de l'Edimbourg sorcier étaient proches du néant. Non, la plupart des diplômés finissent avec des projets bien plus ennuyants. S'assurer que la route ne s'effondre pas en face du super marché. Visiter des chantiers, et faire des maisons génériques qu'on achète ensuite sur plan pour investir et s'y installer avec sa petite famille et un Golden Retriver. Ou pire encore, constater un sinistre pour une compagnie d'assurance. Son stage l'a finalement vacciné.

Alors à défaut de pouvoir un jour bâtir un véritable monstre que visiteraient des milliers de curieux pour les siècles à venir, Ichabod s'est résigné. Tatoueur, c'est moins prestigieux mais ce n'est pas si mal. Au moins, il a la liberté de créer. Alors, on vient le voir pour ce type de projets. Quand on aime un livre ou un jeu vidéo en particulier, un bâtiment au sein de ce dernier. Quand on a un souvenir cher d'un lieu très précis. Soit il invente pour correspondre à la vision artistique du client ou de la cliente, soit il reproduit. Si un terrain, c'est généralement relativement droit pour construire (à l'exception des constructions troglodytes) un corps ça ne l'est pas. Il n'a pas choisi la facilité et dans son perfectionnisme et son sens du détail, l'Aéromancien s'obstine pourtant à reproduire des cathédrales gothiques aux angles parfaits et aux lignes droites sur des mollets qui ressemblent d'avantage à des putains de collines qu'à un centre ville plat et déjà pavé.

Vraiment, Aydan a besoin d'un café. Ichabod grimace au bruit de la machine. Le Pyromancien ne semble pas s'être rendu compte que le vacarme était causé par une absence d'eau. Poussant donc ce dernier d'une main, le tatoueur arrache la partie concernée pour la remplir dans l'évier à côté. Il est trop tôt pour avoir du bruit, surtout avec ses oreilles sensible d'enfant des vents à l'ouïe développée.

« C'était rude le week end ? T'as fait la fête ou ramené une fille chez toi pour être endormi comme ça ?  »

Peut-être ni l'un ni l'autre. Ou les deux à la fois. Ce n'est après tout pas incompatible d'aller à une soirée et d'y rencontrer quelqu'un. De ramener la personne chez soi, sans rien attendre de plus et de se séparer au petit matin. De souvent, partir sans prendre le petit déjeuner ni laisser un numéro.

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« PUTAIN DE MERDE. »

Le cri du cœur, littéralement. C'est sorti tout seul, pour le coup. Un peu comme quand il a juré très fort à cause du canapé de Liya et de leurs galères qui s'enchaînaient à Noël. Aydan, il va lui falloir bien plus qu'un café ce matin. Après avoir fait tourner la machine sans eau, il casse une tasse, qui s'éclate sur le carrelage trop bruyamment. Les mains sur les oreilles, l'Aéromancien préfère fuir la scène de carnage après lui avoir foutu la balayette dans les mains, et s'être calé une clope entre les dents. Les bruits de la rue sont plus supportables pour lui, plus que les conneries du Pyromancien en tout cas.

Il n'y a plus que lui, sa nicotine à la bouche, sa caféine dans la main. Un bruit de circulation un peu plus bas dans la rue, signe qu'un camion de livraison est en train de décharger des choses pour un commerce avant que les magasins ne soient ouverts pour la journée. Ichabod a conscience qu'il doit se calmer. Prendre le temps de finir de se réveiller lui aussi avec une clope et un café, se recentrer, oublier la colère qui bouillonne en lui a cause de la maladresse de son collègue. Il a préféré d'isoler, cinq petites minutes, pour ne pas risquer d'exploser lui aussi -comme la malheureuse tasse sur le sol. Parce qu'il va regretter de s'emporter. Parce que ça va faire un drame de bon matin, qu'il n'a pas le courage pour ça. Qu'entre un cyclone humain et un briquet sur pattes, ça ne fera pas bon ménage. L'air attise le feu il le sait. Pour peu que le Pyromancien s'énerve et use de sa magie lui aussi, ça ne feras qu'escalader et le shop sera réduit en cendre d'ici vingt minutes. Il faut à tout prix éviter ça.

Cigarette jetée dans le cimetière de clopes d'un cendrier débordant devant la porte, Ichabod songe qu'il faudra le vider plus tard. Pas maintenant, il n'en a pas le courage. Poussant une nouvelle fois la porte d'entrée du salon de tatouage donc, il espère que par miracle, en rentrant une deuxième fois, la journée ait été remise à zéro.

« Bon. T'as pas l'air d'aller bien. Tu couves un truc Aydan ? »

C'est un zombie en face de lui. Clairement. Et généralement, on a pas très envie de se faire tatouer par quelqu'un qui n'a pas les yeux en face des trous. Il ne connait pas son planning d'aujourd'hui. Chaque personne se charge de ses rendez-vous personnels, vient quand iel a besoin de travailler ou qu'iel a envie d'être là pour dessiner ou autre. Tout ce que l'Aéromancien espère donc, c'est que monsieur bouclettes ne va pas avoir d'aiguilles dans les mains avant au moins une heure ou deux, le temps d'émerger convenablement.

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Sa conscience professionnelle lui crie de renvoyer Aydan chez lui aujourd'hui. Que dans son état, il n'arriveras à rien de bon. Mais Ichabod est tiraillé et circonspect face à cette demande étrange. Retrouver un dessin, dont il ne se souviens même plus à quoi il ressemble. Est-ce que c'est seulement possible d'être autant à côté de la plaque ? Fronçant les sourcils, le géant se penche légèrement vers son collègue pour le regarder de plus près.

Il n'a pas toussé, n'a pas le nez rouge et ne se balade pas avec des mouchoirs. Une main pausée sur le front sous les boucles du Pyromancien lui indique rapidement qu'il ne semble pas avoir de fièvre. Les mains de l'Aéromancien sont encore fraîches de sa sortie cigarette, mais Aydan n'est pas brulant non plus. Parcontre, il a vraiment des petits yeux fatigués.

« Je te dirais bien de regarder sur ton bureau ou vers ta station de tatouage pour retrouver ton dessin. »

Ce sont les premiers endroits logiques qui lui viennent à l'esprit, il ne lui a pas fallu longtemps pour le déduire et toute personne dans son état normal tirerait les mêmes conclusions. Parce qu'il n'est pas non plus l'homme le plus intelligent du monde. Le tatouer préfère parler d'éducation, ce qui en soit est une chance plus qu'autre chose. Une chance qu'il doit à la classe sociale aisée l'ayant vu naître, la seule chose positive qu'il ait tiré des Karlsson même si enfant, il haïssait ses cours de musique et de français lors des vacances d'été.

« Mais Aydan, tu devrais appeler ton client pour annuler et retourner te coucher. Revenir quand ça iras mieux, décaler tes rendez-vous du jour si tu en as d'autres plus tard. »

S'ils travaillaient dans un cabinet de comptabilité, Ichabod n'aurait pas poussé son collègue à forcément rentrer chez lui. Il lui aurait proposé un thé et un ibuprofène pour se requinquer, au pire, un verre d'eau avec un truc sucré à manger. Mais là on parle d'encrer une peau pour la vie. De modifier l'apparence d'un autre être humain pour le restant de ses jours. Le tatouage n'est pas un acte anodin et lui prend ça aussi sérieusement que s'il était un chirurgien esthétique altérant l'apparence d'une personne qui cherche à corriger un défaut lui gâchant la vie.

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Ichabod est à deux doigts de dire à Aydan qu'il n'est pas sa mère. C'est vrai, c'est même peu probable et totalement impossible qu'il soit sa daronne. Déjà parce qu'il n'est pas une femme mais aussi parce qu'il n'est pas si vieux que ça. Oh ça lui arrive souvent de plaisanter avec Liya, de dire qu'il est déjà sénile à trente trois ans. Mais en vérité, il ne se sent pas si âgé que ça -pour le moment. Malgré quelques hobbys de trentenaires qui s'installent, la dernière fois le tatoueur s'est surpris à regarder les oiseaux pendant l'une de ses innombrables pauses cigarettes. Déclarant fièrement au client qui l'accompagnait : Oh, une Mouette pygmée c'est rare d'en voir ! Réfléchissant à sa propre vieillesse qui arrive, craignant soudainement la calvitie en plus du mal de dos, le plus âgé des deux fais donc couler un café à Aydan parti chercher son dessin. Il peut au moins faire ça pour essayer de le réveiller. Ichabod pourtant n'est toujours pas convaincu que ce soit une bonne idée de le laisser tenir des aiguilles aujourd'hui. Il suffit de voir le temps qu'il a pu mettre à se lever, à réagir pour aller à la recherche du croquis perdu pendant qu'il lui faisait couler le dit café potentiellement miracle - bien qu'il dite fortement de l'efficacité de la chose étant donné son état.

« Je sais pas pour Liya, je crois oui, cet après midi ? »

En parlant d'oiseau justement, voilà que monsieur bouclettes se rapproche avec un papier froissé. Ichabod n'est pas un expert, pas encore du moins peut-être qu'il le deviendra une fois à la retraite. C'est ce que font beaucoup de personnes âgées non ? Se trouver une passion quelconque pour s'occuper dans ses vieux jours. Il y a plusieurs choix : le bingo, les oiseaux ou glander devant la télé en dormant et râler dès qu'on change de chaine en criant qu'on regardait. Malgré son manque de connaissances poussées en Ornithologie, il constate bien que ce n'est pas un oiseau. Echange de bon procédés, le café salvateur est tendu contre la feuille :

« Euh. »

Ornitho est un préfixe issu du grec ancien et étant relatif aux oiseaux. C'est sans doute la seule ressemblance entre le dessin et un animal volant. Parce que ce n'est pas une mouette pygmée. Ni même un pigeon, ou une chouette ou qu'importe.

« Non, ça c'est un Ornithorynque. »

Il doute que la blague sur l'étymologie ferait mouche, trop intellectuelle pour quelqu'un dans l'état d'Aydan et sans doute pas spécialement drôle si l'on est pas un minimum intello. Et ce n'est pas le cas de son collègue, n'ayant jamais aimé l'école.

« Et vu la gueule de ta feuille ça doit être un brouillon que t'as balancé. »

Parce que ça ressemble d'avantage à un chiffon dont on se sert pour nettoyer les vitres qu'à une œuvre d'art travaillée.

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Comme c'était à prévoir, le café n'est malheureusement pas miraculeux. C'était évident qu'il lui faudrait plus que ça. En complément, son tour aux WC n'aide pas réellement non plus. A bout d'options, Ichabod soupire, croise les bras et serre la mâchoire.

« Est-ce que tu sais combien il y a d'espèces d'oiseaux dans le monde, Aydan ? »

Lui-même ne sait pas, en toute honnêteté. Trop pour être comptées. L'Ornithologie est une discipline très vaste et remplie de milliers d'espères. Milions ? Beaucoup, en tout cas, sans doute quasiment autant que les poissons que l'on a d'ailleurs pas encore tous découverts tant certaines espèces vivent profondément, dans des lieux que l'on ne peut pas explorer facilement. Il suffit de voir le temps qu'on a pris pour découvrir qu'il y avait bel et bien des calamars géants, qui ont sans doute été à l'origine des mythes du fameux Kraken redouté des marins d'autrefois. ça en fait des beignets tout ça, vu la taille de la bestiole.

« Un oiseau c'est très vague comme description. ça peut être une autruche, comme un moineau ou un truc plus exotique comme un paradisier là, ceux plein de couleurs. Voir un pigeon si ça se trouve. »

Il y en a de toutes les tailles, de toutes les formes, de toutes les couleurs. Si ça se trouve, le gars voulait un truc super spécifique. Qu'est-ce qu'il en sait, Ichabod ? Décidément ce matin, personne ne sait grand chose au Bad Decisions. La seule chose que le plus âgé sait c'est que son collègue n'est pas en état de travailler. ça fait toujours chier, de décaler un rendez vous, de perdre de l'argent sur une journée et de devoir remettre à plus tard.

« Alors non, tu ne peut pas dessiner un oiseau vite fait et espérer que ça passe, sans savoir l'espèce concernée et encore moins, sans te souvenir de ce que t'as demandé ton client. Imagine que c'est le familier de sa grand-mère qui vient de mourir, qu'il était super proche d'elle et que c'était un tatouage pour se souvenir d'elle ? Si tu lui montres un poulet alors qu'elle avait un émeu, le gars va faire une drôle de tête. Et p'tet même te casser la gueule si c'est un nerveux. »

On ne sait jamais après tout. C'est le genre de couille qui peut arriver ça peut dégénérer très rapidement et l'Aéromancien n'a pas envie de jouer la sécurité aujourd'hui. Décidément inquiet et toujours convaincu qu'Aydan n'est pas en état, il soupire longuement en levant les yeux au ciel et s'approche du pyromancien. Pose sa main fraîche contre son front en passant sous ses boucles pour s'assurer qu'il n'a pas de fièvre. ça expliquerait beaucoup, surtout ses idées délirantes et son manque de cohésion dans ses propos. Tout le monde sait différencier un ornithorynque d'un oiseau passé l'âge de cinq ans. Et même si on ne sait pas ce que c'est un ornithorynque, on voit bien que ça n'a pas d'ailes et que donc, ce n'est pas un oiseau. Même les gens très con sauraient faire la différence.

Si le p'tit O'Ferghail n'est pas anormalement chaud, il y a autre chose qui cloche. Plissant les yeux en baissant son visage au niveau de celui de l'autre, un peu trop proche pour qu'on se sente à l'aise d'une telle proximité, Ichabod fronce les sourcils :

« Ou c'est peut-être moi qui vais te casser la gueule, Aydan. »

Les yeux rougis ne trompent personne. A son âge, il sait bien ce que c'est. Lui évite la fumette, qui ne lui réussit absolument pas. S'en tiens surtout à l'Alcool quand il fait la fête et ne boit jamais outre mesure s'il sait qu'il doit travailler le lendemain. Se montre raisonnable, sait qu'il peut assumer une gueule de bois tant qu'il n'arrive pas au black out total. Aydan lui, ce n'est pas de l'alcool.

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« De nous deux, c'est pas moi qui ait un problème Aydan.  »

Essuyant ses mains dans un torchon par réflexe, le geste peut sembler malpoli. Et c'est le cas, le comportement d'Aydan déçoit énormément le plus âgé. Se raclant la gorge, tentant de se calmer, l'Aéromancien soupire longuement. Il n’y a pas d’autre solution, que d’user de son don de parole pour tenter de régler cette situation le plus calmement possible. Par soucis d’ethique et professionnalisme, l’enfant des vents ne peut se résoudre à laisser son collègue se saisir d’aiguilles dans son état du jour. Oh, il sait bien que ça ne suffiras pas à le faire arrêter. Que s’il est dans cet état ce n’est pas parce qu’il fume un petit joint de temps en temps pour se détendre. Non, c’est bien plus sérieux mais cette conversation… Ils ne peuvent pas l’avoir immédiatement. Est-ce qu’il est même possible de faire prendre conscience de son problème à une personne souffrant d’addiction ? Souvent, non. C’est ce que lui a raconté son ami Zephyr.

Bien qu’il soit un homme à l’humeur joyeuse, Ichabod l’a écouté lorsque ce dernier s’est confié sur son passé. Une histoire bien plus lourde qu’il ne l’aurait cru. En tant que Botanomancien, sa physilogie le protège des effets néfastes des drogues végétales. Mais ce sont celles moins naturelles et syntéthiques qui il y a quelques années, l’ont ammené au fond du trou. Il n’y a qu’une fois seul et au pied du mur que Zephyr a pu se prendre en main. Arrêter toutes ces merdes, lors qu’une crise mystique dans la forêt. La méthode est un brin incongrue, mais elle a fonctionnée pour lui… Aydan un jour, aura peut-être le même déclic. Car il ne doute pas un seul instant que les proches de Zephyr l’ait poussé à chercher une solution, l’ait aidé à essayer de faire une cure quelconque sans le moindre résultat. Il n’y a qu’une décision personnelle qui feras réellement la différence chez quelqu’un d’accro aux substances.

Ichabod espère d’ailleurs sincèrement qu’il n’y a rien de plus grave que du Cannabis. Passant une main sur son visage et inspirant longuement pour se concentrer, l’Aéromancien laisse donc ses paroles flotter en direction du Pyromancien en espérant faire mouche. Il était si doué, lorsqu’il était à l’Académie. Sa famille aurait aimé le voir faire une carrière politique. Si la Télékinésie n’est pas nécessairement son domaine de prédilection, les mots eux, ont toujours été naturels pour Ichabod. Mais avec un esprit aussi embrouillé que le sien, est-ce que sa magie parviendra à faire effet sur Aydan ? A au moins le faire réfléchir un minimum à défaut de le convaincre totalement ?

« Je ne suis ni ta mère ni ta gonzesse, je ne vais pas te prendre par l’affect Aydan. Mais écoutes moi bien : j’ai beau ne pas être ton boss, je te demanderai de vouloir reconsidérer l’éventualité de ne pas travailler aujourd’hui et de prendre la décision la plus professionnelle que tu puisses faire dans ton état actuel : rentrer chez toi. T’es tatoueur, t’as une certaine responsabilité en vers tes clients. Ils vont garder ton tatouage toute leur vie, c’est pas anodin et ça ne s’enlève pas facilement. Si tu merdes, c’est pas que ta réputation qui est en jeu, mais aussi celle du shop dont tu fais partie. ça nous touche nous aussi, les autres. Alors aujourd’hui, tu vas rentrer chez toi. Je me chargerai personnellement de t’excuser au près de tes clients qui viendront au salon aujourd’hui, je vais couvrir ta connerie et arranger la merde dans la quelle tu t’es mis. Mais en échange, tu dois me promette de ne plus jamais revenir dans un état pareil au travail. La prochaine fois, je ne vais pas seulement te parler. »

TW : drogue & mention d'alcoolisme
Qu'il est bon d'avoir raison. Certes, Ichabod s'est concentré pour user de sa magie et mettre un peu de plomb dans la cervelle du plus jeune. Le voilà soudainement à penser comme un vieux, comme un adulte responsable à se dire que la jeunesse part à la dérive et qu'à son époque ce n'était pas comme ça. Mais si, lui aussi a été jeune et con et c'est le cas de tout le monde. Au même âge qu'Aydan, vers 24 ou 25 ans, lui aussi faisait tout un tas de conneries qu'il ne ferait plus aujourd'hui. La drogue bien que ça ne l'ait jamais attiré plus que ça, il comprend. Dans son cas c'était -et c'est toujours dans une moindre mesure- l'alcool. Si vous lui demandez, l'Aéromancien répondra qu'il n'a pas de problème, qu'il arrête quand il veut et qu'il n'a pas besoin de boire tous les jours. Pas comme avant, que ça va mieux, qu'il n'a plus de problème. La réalité, c'est qu'il ne dit jamais non à un verre ou deux, ou cinq ou six voire une bouteille. Certes, il ne boit plus quotidiennement. Mais est-ce que c'est un comportement sain pour autant ? Non. En a-t-il conscience ? Non plus.

« Oui, je pense que c'est une très bonne idée de rentrer pour aujourd'hui. C'est la chose la plus mature et adulte que tu puisses faire étant donné les circonstances. »

Il a aussi ses grands airs qui reviennent naturellement à croiser les bras d'un air sévère, la posture et l'expression rappelant en tout point le grand-père McGuire.

« Je n'en parlerai pas aux autres. Si on me demande, je dirais que tu as été malade. Si on cherche à savoir quelle maladie précise tu avais ce matin, je dirais que c'est une gastro. C'est la moindre des choses pour te couvrir, autant que je m'amuse un peu en choisissant quelle mal imaginaire t'afflige. »

Ce n'est pas sa place, de dire qu'Aydan a des problèmes avec la drogue. Peut-être qu'il en parlera en privé avec Liya, s'il commence à réellement s'inquiéter pour la santé du Pyromancien. Pour chercher des conseils, afin de réguler la situation, faire en sorte qu'il soit capable de continuer à travailler convenablement et de subvenir à ses besoins. ça peut rapidement devenir une pente très glissante, cette affaire. Les joints qui prennent le dessus sur le reste, sur la vie sociale et professionnel. S'il n'y a plus assez d'argent, on finit à la rue ou dans l'illégalité pour subvenir à ses besoins et continuer d'acheter de quoi consommer. Et Aydan, il a beau lui en vouloir d'arriver totalement déconnecté de la réalité, il ne lui souhaiterais pas d'en arriver là.